Ostwald
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La question des dangers auxquels nous exposent notre société technologique et son mépris de l'environnement naturel est visiblement dans l'air du temps, si l'on se fie à la récurrence avec laquelle cette thématique est actuellement abordée dans la littérature (je pense, en vrac, au dernier roman de Marie Darrieussecq, à celui de Claire Vaye Watkins, ou encore à "Dans la forêt" de Jean Hegland, que je viens de terminer)...
Dans "Ostwald", premier roman de l'écrivain Thomas Flahaut, cette menace prend la forme d'un accident nucléaire, qui ne sera que brièvement évoqué : nous n'aurons connaissance ni de son ampleur, ni de sa gravité, qu'aucun signe tangible ne révèle. Car ce qui intéresse surtout l'auteur, c'est d'explorer les répercussions de la survenance de cet accident sur le comportement des individus.
Noël, le narrateur, vit à Belfort, chez sa mère, depuis que ses parents se sont séparés. Leur union n'a pas résisté aux conséquences qu'a eu sur leurs vies le plan social ayant marqué la fin de leur carrière à l'usine Alstom de Belfort, quelques années auparavant. Son père s'est quant à lui installé à Ostwald, près de Strasbourg. Son frère Félix, après six ans d'études, sans emploi, a lui aussi réintégré le domicile maternel. Au moment de la catastrophe, ils sont seuls, leur mère étant en déplacement sur Marseille, et doivent intégrer les convois d'évacuation à destination d'un camp dans la forêt.
Là, sous la surveillance de gardes armés, la population est maintenue dans l'incertitude de ce qui se passe ailleurs, comme de ce qu'ils vont devenir. Au bout de quelques jours, Noël et Félix s'enfuient et, traversant des paysages désertés, grisâtres, gagnent Strasbourg ...
Le récit, succession de courts chapitres, porté par une écriture taillée au cordeau, est empreint d'une sorte d'atonie évoquant une vie sans sève, plombée par le désœuvrement provoqué par une perte de sens, de repères. Les individus, passifs, impuissants, subissent des stratégies économiques qui les dépassent, des décisions les concernant mais dont ils sont exclus. Hanté par l'imprécise et impalpable menace que constitue la possibilité -réelle ou fantasmée- du chaos, qui vient comme parachever la structure d'un système où l'homme ne trouve plus sa place, "Ostwald" capte la désespérance que suscite chez l'individu le sentiment d'être à la fois inutile et manipulé.
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