
Les sentiers obscurs de Karachi
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l’avis des lecteurs
A l'occasion des 20 ans du Festival international Quais Du Polar à Lyon, ce ne sont pas moins de 138 auteurs et autrices plus ou moins proches de la littérature noire qui seront présents pour célébrer cette édition anniversaire. Parmi tous ces invités, on ne manquera pas de croiser Olivier Truc, récipiendaire en 2013 d'une quinzaine de récompenses littéraires, dont le prix des lecteurs des Quais Du Polar, pour Le Dernier Lapon (Métailié 2012), inaugurant la fameuse série de la Police des Rennes constituée de quatre ouvrages mettant en scène les enquêtes de Nina Nansen et Klemet Nango se déroulant en Laponie, cette région méconnue du Grand Nord que ce journaliste, notamment correspondant auprès des grands médias français pour les pays nordiques et baltes, a mis en avant en nous permettant de nous familiariser avec la culture des Samis. Dans un registre très différent, Olivier Truc a également coécrit avec Sylvain Runberg On Est Chez Nous (Robinson 2019/2020), une BD en deux tomes, dessinée par Nicolas Otéro où l'on découvre l'enquête d'un journaliste parisien s'intéressant à une petite localité provençale gérée par un parti d'extrême-droite alors qu'un immigré clandestin est retrouvé lynché à un arbre avec un pancarte provocatrice autour du cou. Ainsi, au-delà de l'esprit d'aventure qui l'anime et de l'aspect pittoresque des lieux qu'il dépeint, Olivier Truc s'emploie à soulever les faits de société méconnus et à en dénoncer les éléments les moins reluisants à l'instar d'un roman comme Les Sentiers Obscurs De Karachi où il se penche sur l'affaire d'état française des submersibles vendus au Pakistan en se focalisant sur l'attentat de 2002 à Karachi qui coûta la vie à quatorze personnes dont onze ingénieurs français travaillant sur ces sous-marins militaires.
Avril 2022, à Cherbourg, on se prépare à commémorer les 20 ans de l'attentat de Karachi qui a touché les employés de la base nautique de la ville, dans une atmosphère tendue, imprégnée d'amertume pour les survivants et les familles des victimes alors que les investigations pour désigner les coupables sont désormais au point mort. Proche d'un des rescapés de l'attentat, Jef Kerral, journaliste local auprès du quotidien La Presse de la Manche, décide de faire la lumière, bien au-delà des probables pots de vin destinés à financer la campagne de Balladur, sur les aspects troubles qui entoure les commanditaires et les auteurs de cet acte terroriste. Mais en se rendant à Karachi, Jef Kerral s'oppose à des forces obscures telles que les services secrets pakistanais cherchant à enterrer à tout jamais cette affaire d'état embarrassante. Pourtant, il pourra compter sur l'aide de Sara Zafar une jeune lieutenant de la marine pakistanaise qui le mettra en contact avec Shaheen Ghazali, officier et ingénieur de haut rang, droit et loyal, qui a toujours eu à coeur de connaître l'identité des individus qui s'en était pris à ses amis français. De discussions sur la plage déserte d'un modeste village de pêcheur, en conversations dans un rickshaw tout en parcourant les grandes avenues de la capitale, jusqu'aux confidences au détour des allées étroites et encombrées de livres de l'Urdu Bazar, Jef Kerral découvrira probablement la vérité glissée entre les lignes des poèmes que déclament les poètes vagabonds qui savent se faire entendre.
Avec "l'affaire Karachi", les médias avaient principalement évoqué les aspects autour des rétro-commissions et du financement occulte de la campagnes présidentielle de Baladur, ce qui fait qu'Olivier Truc s'est davantage concentré sur le volet pakistanais de l'attentat de 2002 et de ses méandres obscurs sur lesquels il s'emploie à projeter un éclairage romancé, richement documenté, qui ne paraît pas du tout absurde, bien au contraire. Le récit s'articule autour de la commémoration des vingt ans de l'attentat en mettant en exergue les dissensions animant les collaborateurs de la base nautique de Cherbourg, avec ceux qui souhaiteraient que toute la lumière soit faite sur cette affaire tentaculaire s'enlisant peu à peu dans des procédures sans issues, tandis que d'autres aspirent à protéger l'un des fleurons de l'industrie française dont certains dirigeants semblent pourtant compromis dans un vaste réseau de corruption. Tiraillé entre les antagonismes de ses proches et probablement par défiance vis-à-vis de son père, Jef Karral, journaliste local de Cherbourg, va endosser le rôle de grand reporter en se rendant à Karachi afin de rencontrer l'homme pouvant lui révéler les circonstances entourant cet attentat qui devient une affaire d'état avec des implications au niveau des services gouvernementaux. Sur une alternance entre le passé et le présent, Les Sentiers Obscurs De Karachi, nous donne l'occasion de découvrir une ville tentaculaire et chaotique, régulièrement secouée par des vagues d'actes terroristes plus meurtriers les uns que les autres qui frappent le quotidien des habitants comme en témoigne Sara Zafar, cette officière de l'armée, qui va servir de guide et de personne de contact pour le journaliste français. C'est l'occasion pour Olivier Truc de décliner les rapports sociaux qui régissent les différentes castes de la communauté pakistanaise et des implications complexes qui en découlent tout en parcourant les rues d'une ville au charme indéfinissable, malgré la violence et la tension qui semblent omniprésentes. Et puis, en filigrane, bien plus qu'un simple prétexte, il y a cette poésie ourdou imprégnant l'ensemble du texte et dont les vers recèlent des révélations que clament les poètes de la rue arpentant les travées sinueuses de l'Urdu Bazar, lieu emblématique de la capital pakistanaise, pour devenir le cadre exceptionnel où évoluent les protagonistes du récit dans un chassé-croisé habile et dynamique. Ainsi, au gré d’une intrigue intense et d’une densité peu commune qu’il parvient à maîtriser de bout en bout en dépit de sa brièveté relative, Olivier Truc décline, l’air de rien, les reflets géopolitiques de cette affaire complexe régissant les rapports entre la France et le Pakistan qu’il met en scène à la hauteur de ces hommes et de ces femmes qui vont se retrouver impliqués dans les méandres d’une histoire qui les dépasse tous autant qu’il sont, en saluant plus particulièrement le profil inquiétant de ce responsable des services secrets pakistanais particulièrement réussi. Tout au plus regrettera-t-on cette idylle naissante entre Jef Kerral et Sara Zafar qui, en plus d’être téléphonée, se révèle plutôt dispensable, sans que cela ne dénature pour autant l’ensemble d’un roman d’une originalité saisissante.
Cette originalité, on la retrouvera également dans L'Inconnue Du Port, bref récit policier résultant d'un partenariat littéraire avec la romancière espagnole Rosa Montero initié par le festival Quais du Polar pour mettre en scène une enquête portant sur le trafic d'êtres humains se déroulant entre Lyon et Barcelone avec la découverte d'un femme frappée d'amnésie que l'on retrouve ligotée dans un container vide. Une intrigue dynamique se déclinant autour du point de vue d'Anna Ripoli, inspectrice de la PJ à Barcelone et d'Erik Zapori, flic en disgrâce de la police de moeurs lyonnaise.
Olivier Truc s’est inspiré pour écrire son roman d’un tragique fait réel : l’attentat du 8 mai 2002 qui, à Karachi, coûta la mort à onze techniciens français de la Direction des constructions navales (DCN), fleuron de l’industrie française basé à Cherbourg. Les victimes étaient venues apporter la dernière touche à la livraison d’une commande de trois sous-marins, qui avait en 1995 suscité un premier scandale autour d’une affaire de rétrocommissions ayant servi à financer la campagne électorale du candidat Balladur à la présidentielle. Des Pakistanais liés à Al-Qaida furent condamnés puis remis en liberté en 2009, ce qui fut considéré comme un affront par les familles des agents décédés.
Les personnages qu’il met en scène, prétexte à imbriquer secrets d’Etats et secrets de famille, sont en revanche fictifs.
Il adosse son intrigue à deux parallèles. Le premier est temporel, et consiste en l’alternance de deux comptes à rebours de quelques semaines, l’un qui en 2002 s’achemine vers l’attentat, l’autre déroulant les jours qui nous rapproche du vingtième anniversaire de sa commémoration.
L’autre parallèle est géographique, et se traduit par les allers-retours de l’intrigue entre Cherbourg et Karachi.
Tous ces pans sont reliés par le personnage de Jef Kerral, jeune journaliste cherbourgeois qui se morfond dans un quotidien local, et rêve d’aventureux reportages à l’étranger. Marc, le père d’un de ses amis, est un des blessés ayant survécu à l’attentat. Rongé d’amertume, il est obsédé par l’évidente volonté d’étouffer l’affaire qui a poussé à bâcler l’enquête, et a empêché que justice soit rendue. Jef admire cet homme, fasciné par l’aura dramatique qui l’entoure, fascination qu’il oppose au mépris qu’il éprouve pour son père, lui aussi employé de la DCN, mais ayant adopté suite à l’attentat une attitude de soumission loyale, refusant de faire des vagues.
Chargé de couvrir la commémoration de l’attentat pour son journal, Jef parvient à convaincre son employeur de le laisser partir à Karachi afin d’y préparer un article sur l’amitié entre Marc et son homologue pakistanais de l’époque de l’attentat, l’officier mécanicien Shaheen Ghazali. C’est ainsi qu’il rencontre la belle Sara Zafar, officier de la marine Pakistanaise, qui doit le mettre en relation avec ce dernier, qui depuis le drame n’est plus que l’ombre de lui-même.
L’auteur déploie pleinement à partir de ce moment la face pakistanaise de son récit, en nous immergeant dans la touffeur de cette ville grouillante et tentaculaire qu’est Karachi, dans un contexte de montée de l’islamisme, le départ des Américains de l’Afghanistan ayant revigoré ses groupes talibans. Près de vingt millions d’habitants y subissent une chappe de puanteur, de poussière et de pollution qui a éradiqué, à l’exception des corbeaux et des milans, tous les oiseaux. Karachi concentre toutes les contradictions du Pakistan. Gangrénée par l’autoritarisme des mollahs et des militaires, par les gangs, les affrontements entre les divers groupuscules d’obédience religieuse et la misère, c’est aussi une ville de poètes, et de résistants de l’ombre à l’obscurantisme et à la violence. Sa "géographie noire" nous rappelle qu’ici, le risque d’attentat est quasi quotidien. Au moment de l’arrivée de Jef, une école a été la cible du douzième de l’année, faisant une cinquantaine de morts, dont trente enfants.
Le roman est ainsi instructif, par son aspect géopolitique et cette incursion en terre pakistanaise. Je suis plus réservée sur sa construction narrative, trop schématique, et sur la dimension romanesque de l’intrigue, souvent prévisible et nuisant à mon avis à la crédibilité de l’ensemble (je ne comprends pas ce qui a notamment poussé l’auteur à y introduire une histoire d’amour qui m’a paru complètement incongrue)…
Olivier Truc quitte le grand nord pour Les sentiers obscurs de Karachi.
Le 78 mai 2002, un attentat devant l’hôtel où logent les ingénieurs et techniciens français de la Direction des Constructions Navales (DCN) qui travaillent au transfert de technologie et à la livraison de 3 sous-marins au Pakistan fait des dizaines de blessés et 14 morts, dont 11 ingénieurs français.
20 ans plus tard, alors qu’à Cherbourg on prépare les commémorations, les victimes savent que la vérité ne sera jamais faite sur cet attentat. L’enquête a révélé tout un système de corruption en France, mais les véritables coupables n’ont pas vraiment été recherchés. Jef Kerral, jeune journaliste au canard local, fils d’un employé de la DCN, et ami du fils d’une des victimes, Marc Dacian, qui a survécu, décide de partir sur place, rencontrer un ancien ami pakistanais de Marc, Shaheen Ghazali. Peu de temps avant l’attentat Shaheen avait mis Marc en garde en lui disant qu’il se tramait quelque chose de louche.
A Karachi il va vite se rendre compte qu’il est plus dangereux d’enquêter sur les services secrets pakistanais à Karachi que sur la fête du cidre à Cherbourg.
Roman intéressant, mais à mon avis moins abouti que les précédents romans de l’auteur. Et cela tient, à mon goût, à des personnages auxquels on croit moins et auxquels on s’attache moins qu’à ceux de Klemet et Nina. J’ai tout d’abord eu un peu de mal à croire à celui de Jef Kerral, spécialiste des fêtes dans les EPHAD locales qui, d’un coup, part enquêter à Karachi comme un vrai baroudeur. Et celui de Sara, sur place, aurait mérité d’être plus fouillé, c’était celui qui pouvait s’avérer le plus intéressant. Pour finir, les personnages secondaires manquent de complexité, trop tout blanc ou tout noir. Même si le méchant de service est assez réussi, ce qui, on le sait tous, est absolument indispensable.
Ceci dit le roman se lit quand même avec plaisir. La découverte de Karachi au travers du double regard du candide Jef et de la locale Sara est intéressant. Ce que l’on apprend de cette affaire pour le moins trouble est passionnant, et la résolution de l’intrigue arrive à être assez éclairante tout en ne recherchant pas le scoop improbable.
Intéressant donc surtout sur le fond, sans être le polar de l’année.
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