Tropique de la violence
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
Où?
Le roman se déroule à Paris, puis prend très vite la direction de Mayotte et plus précisément à Passamainti, Dembeni, Bandrele, Kani Keli, Mamoudzou, Bandrakouni, Kaweni ou encore la plage de Moya.
Quand?
L’action se situe de nos jours.
Ce que j’en pense
De ce beau roman polyphonique, on retiendra d’abord la voix de Marie, bouleversante. Elle nous retrace une vie que l’on pourrait appeler ordinaire. Celle d’une jeune fille qui choisit d’être infirmière et qui, à 26 ans, croise Chamsidine dans les couloirs de l’hôpital. Il est beau et l’envoûte avec les histoires de son île nichée dans le canal du Mozambique.
Deux ans plus tard, elle est mariée et habite à Mayotte. « Je respire l’odeur de ce pays que j’affectionne, je regarde le fond de l’eau, j’admire les femmes. J’aime observer les enfants qui viennent plonger dans la rade. » Une certaine idée du bonheur qui va se fracasser sur le tropique de la violence. Trompé par un mari qui n’a pu résister au charme des autochtones, Marie demandera le divorce en échange de la reconnaissance d’un bébé qui lui est confié. Moïse, ce nouvel amour va grandir, devenir un beau garçon plein de promesses avant de basculer au moment de l’adolescence, de se révolter. À la recherche de ses racines, c’est un sentiment de colère et de frustration qui domine au moment où il apprend la vérité sur ses origines. Il se sent « un moins que rien, une merde ». Il ne sera pas là le jour où sa mère s’effondre mortellement dans sa maison. Le jeune homme sera devenu un Djinn, un «être malfaisant» avec un œil vert et un œil noir, un assassin.
Avec une belle habileté narrative Nathacha Appanah démonte ce système et nous fait toucher du doigt la «vraie vie» sur ce bout de France à 8000 km de Paris.
Voilà Moïse qui prend la parole et raconte comment il en est arrivé à prendre une arme et tuer Bruce, pourquoi il ne lui reste de sa mère qu’une carte d’identité, son foulard en soie et le livre L’enfant et la rivière. Voici Bruce qui raconte comment on devient le chef de Gaza, ce bidonville qui ne peut être régi que par la force, par la violence et où tous seuls les trafics en tous genres font office d’emploi. Voici encore les voix d’Olivier, le policier qui ne peut que constater son impuissance ou encore celle de Stéphane, parti de France plein de bonne volonté au service d’une ONG prête à apporter son aide humanitaire et qui verra lui aussi s’envoler toutes ses illusions. En accueillant Moïse, il aura peut-être même provoqué sa perte.
Au fil du roman, le lecteur constate avec désarroi combien cet endroit qui aurait pu être paradisiaque respire la violence, l’ignorance et le dégoût. Si, en réalité, tous les enfants qui naissaient là, où arrivaient des îles voisines en quête de France, n’étaient pas foutus d’avance et avec eux, « tous les garçons et les filles nés comme eux, au mauvais endroit, au mauvais moment. »
Poursuivant son œuvre, l’auteur s’affirme. À la famille, un thème déjà très présent dans En attendant demain et dont elle nous offre une nouvelle variation ici, vient se greffer la question des origines admirablement traité par les différentes voix qui s’expriment successivement ainsi que celle plus politique du destin de ces petits bouts de France qui ne sont plus depuis bien longtemps la priorité des gouvernements, sinon pour illustrer la chronique des faits divers et alimenter les discours xénophobes.
On ne peut que souhaiter qu’un Prix littéraire mette encore davantage ces questions en lumière.
J’ai découvert avec ce titre Nathacha Appanah, écrivaine mauricienne francophone. J’y ai aussi découvert l’île de Mayotte, au cœur de son intrigue. Une île administrativement française, mais dont le cadre et les conditions de vie donneront au lecteur métropolitain la sensation d’embarquer pour un autre monde…
Roman choral dont l’alternance des voix dynamise le récit, il débute par une parole venue d’outre-tombe, celle de Marie, infirmière qui a échoué sur l’île par amour pour son mari Cham, collègue mahorais rencontré à l’hôpital. Mais bientôt le couple se sépare, plombé par l’aigreur que fait naître chez Marie son incapacité à tomber enceinte, dont l’amertume est exhaussée par le spectacle incessant des migrantes comoriennes venues accoucher sur Mayotte pour obtenir des papiers. Et puis une occasion se présente, en la personne justement d’une jeune clandestine qui souhaite se débarrasser de son nouveau-né dont les yeux vairons attesteraient du caractère démoniaque. Marie recueille l’enfant, le prénomme Moïse, et l’élève comme son fils. Adolescent, pris de velléités brouillonnes de quête identitaire, il reprochera à sa mère de l’avoir élevé comme un blanc. Et puis un matin, Marie décède brutalement, à l’âge de quarante-sept ans.
Moïse en a alors quinze. Livré à lui-même, il intègre une bande de jeunes délinquants en perdition. Il vient d’en tuer le chef, Bruce (comme Bruce Wayne, l’alias de Batman), dont la mort pourrait bien être l’étincelle qui va mettre le feu à l’île déjà au bord de l’explosion. C’est de la prison où il est incarcéré après s’être livré à la police que Moïse fait entendre sa propre voix, revenant sur le parcours qui l’a mené à cet acte terrible. Sa victime s’exprime ensuite, à l’instar de Marie depuis l’au-delà, déversant sa haine et sa rage, défunt roi d’un territoire de non-droit, à la fois ghetto dépotoir et immense camp de clandestins à ciel ouvert où des bandes de mineurs isolés shootés au "chimique" font la loi.
Les récits d’Olivier, policier humaniste passant ses nuits au poste en laissant s’étioler l’espoir d’une prise de conscience des autorités et de Stéphane, travailleur social pour une ONG qui réalise rapidement que toute sa bonne volonté revient à écoper l’océan avec un dé à coudre, parachèvent la polyphonie, et complètent le sombre tableau.
Cet environnement paradisiaque, qui abrite paraît-il le plus beau lagon du monde, voit chaque jour accoster les kwassa kwassa, ces fragiles embarcations dont les passagers -du moins ceux qui ont survécu- viennent grossir les hordes de miséreux qui peuplent l’île pour moitié. Des enfants meurent sur ses plages dans une scandaleuse indifférence. Le personnel de l’hôpital diagnostique des pathologies qui n’existent plus en métropole que dans les livres de médecine, reçoivent des mères continuant de tenir dans leurs bras des bébés morts depuis plusieurs jours. Les blancs venus de métropole, souvent des fonctionnaires, profitent pendant un à trois ans du cadre idyllique et des jeunes femmes noires, puis repartent avec leurs primes et de grandes théories aussi vaines que les promesses énoncées par les politiques le temps des élections.
Nathacha Appanah parvient à doter, par ses variations de ton, de rythme, de vocabulaire, chacun de ses personnages d’une voix qui lui est propre, et à l’unisson de son état d’esprit, mélancolique, désespéré, ou enragé.
Bien que le trait, dans cette volonté de caractériser ses héros, soit parfois un peu forcé, il émane de l’ensemble une intensité qui happe. Mais surtout, le voyage sur ce minuscule bout de France perdu dans l’océan indien laisse un goût bien amer.
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