Les furies
  • Date de parution 01/02/2018
  • Nombre de pages 528
  • Poids de l’article 271 gr
  • ISBN-13 9782757861271
  • Editeur POINTS
  • Format 178 x 110 mm
  • Edition Livre de poche
Anglo-Saxon Romans étrangers

Les furies

3.36 / 5 (690 notes des lecteurs Babelio)

Résumé éditeur

Lotto et Mathilde sont beaux, séduisants, follement amoureux. Promis à un avenir radieux, ils se marient très vite. Dix ans plus tard, Lotto est devenu un dramaturge au succès planétaire ; Mathilde, dans l’ombre, l’a toujours soutenu. Leur couple est l’image type d’un partenariat réussi. Mais les histoires d’amour parfaites cachent souvent des secrets qu’il vaudrait mieux taire…Née en 1978, Lauren Groff est notamment l’autrice des Monstres de Templeton. Les Furies, choisi comme meilleur roman de 2015 par Barack Obama, a été le succès littéraire de l’année aux États-Unis.« Un roman à la hauteur de ses folles ambitions – comédie puis tragédie tour à tour, d’une érudition à bon escient et tout entier tissé de fulgurances. » - The New York TimesTraduit de l’anglais (États-Unis) par Carine Chichereau

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  • Date de parution 01/02/2018
  • Nombre de pages 528
  • Poids de l’article 271 gr
  • ISBN-13 9782757861271
  • Editeur POINTS
  • Format 178 x 110 mm
  • Edition Livre de poche

l’avis des lecteurs

Où?

Le roman se déroule aux Etats-Unis, notamment en Floride, à New York, dans le Maine, à Poughkeepsie et Albany, État de New York où se trouve le Vassar College, à Boston dans le Massachusetts, dans le New Jersey ou encore à San Francisco, en Californie. Une période se déroule également en France, notamment à Nantes et à La Chapelle-de-l’Estuaire, à Paris et en Bretagne. Enfin, des voyages à Montréal, à Osaka, en Suisse et en Thaïlande, ainsi qu’à Londres y sont aussi évoqués.

Quand?

L’action se situe de la fin des années 1960 à nos jours.

Ce que j’en pense

Si Les Furies est le troisième roman de Lauren Groff, c’est le premier que je lis de cette Américaine de 39 ans. Mais il donne furieusement envie de découvrir les autres. Car l’originalité de sa construction le dispute à la brillance du style.

Il nous plonge dans l’intimité d’un couple, celui que forment Lancelot, dit Lotto, et Mathilde Satterwhite, dont on découvrira plus tard qu’elle s’appelle en fait Aurélie et que sa mère était poissonnière sur les marchés à Nantes.

La première partie est vue du point de vue de Lancelot, la seconde avec les yeux de Mathilde. Ce qui nous donne deux versions totalement différentes et met tout à la fois le ressenti que l’on peut avoir d’un même événement et le mensonge sous toutes ses formes au cœur d’un livre que l’auteur souhaitait au départ publier en deux volumes, baptisés Destins et Furies.

Tout commence merveilleusement bien pour le jeune couple. C’est la période de la lune de miel, celle de tous les possibles. Lancelot connaît ses premiers succès de comédien. Il rêve de gloire, soutenu par Mathilde. Et même si sa riche famille ne semble pas voir son union d’un bon œil, il croit en sa chance. D’autant que jusqu’à présent tout lui a souri, baigné dans cette atmosphère joyeuse de la fin des années 60. Aux premiers succès sur les planches, s’ajoutent ceux auprès des filles : « Lotto fut baptisé « Maître Queue ». Il serait faux de dire qu’il baisait tout ce qui passait, en réalité il voyait dans chaque fille le meilleur de ce qu’elle avait. »

Mais quand il rencontre Mathilde, il sent que les choses deviennent plus sérieuses, que sa vie prend un tournant. D’autant que sa femme devient bien plus qu’une compagne très agréable, une collaboratrice, une protectrice, une gestionnaire de carrière, apparemment pleine d’abnégation.

Et si les amis s’éloignent peu à peu, peu importe. Car Lotto choisit de se lancer dans une carrière de dramaturge, entend revisiter la mythologie et réussir en tant qu’auteur plutôt qu’en tant qu’acteur. De premiers succès font du bien à son égo, mais l’installent aussi dans une sorte de confort proche de la cécité. Car il ne voit plus la vie qu’à travers le prisme de cette œuvre qui se construit « Quelque chose se passait tout au fond de lui. Un haut-fourneau qui le carboniserait s’il s’ouvrait. Un secret si profondément enseveli que même Mathilde l’ignorait. »

Imperceptiblement, il s’éloigne de sa femme. À l’image de l’opéra sur lequel il travaille avec Leo, on sent le drame couver, on imagine l’issue tragique. Et si l’on voit bien le dessein de l’auteur qui entend souligner cette descente aux enfers avec les extraits des œuvres de Lancelot, il faut aussi reconnaître qu’elles rendent la lecture moins fluide… Jusqu’au moment où la version de Mathilde prend le relais.

Ici, les secrets ont un poids autrement plus lourd. Sur les circonstances qui ont conduit cette fille unique de France aux Etats-Unis, sur la relation qu’elle entretient avec son «protecteur», sur la manière dont elle partira à la recherche d’un bon parti. Le mariage n’est plus alors une belle histoire d’amour, mais le fruit d’un calcul qui tient davantage de Machiavel que de Cupidon.

Au fil des révélations, le récit devient stupéfiant, fascinant. Très troublant. Entre le personnage lisse et bien-né de Lotto et les failles et la complexité du personnage de Mathilde, Lauren Groff dissèque bien davantage qu’un mariage. Elle fait voler en éclat la légende de l’amour qui serait la «fusion avec l’autre», brise la version trop fleur bleue du rêve américain et radiographie une société qui se cherche des valeurs, une vision. On comprend, en refermant ce livre, que Barack Obama a pris beaucoup de plaisir à le lire. À votre tour…

C'est finalement une banale histoire d'amour... mais comme dans toutes les histoires -même celles a priori banales-, on trouve, en creusant un peu, des fissures pas toujours bien colmatées, des vérités soigneusement dissimulées, ou subtilement manipulées... Et tout le talent de Lauren Groff consiste à mettre au jour ces fondations bancales et pourtant inébranlables. 


Mais avant cela, elle nous aura livré la version lisse de l'histoire...


Cette version, Lotto Satterwhite en est au centre, ou plutôt en est LE centre. Né en Floride une nuit d'ouragan, adulé et choyé par les femmes du foyer -sa mère, la belle Antoinette, et la tante Sallie-, il voue quant à lui une véritable adoration à son père qui meurt brutalement d'un anévrisme alors que Rachel, la petite sœur de Lotto, vient de naître.


Ses écarts adolescents incitent sa mère à l'éloigner de la Floride, où il ne remettra pratiquement plus les pieds. Au départ profondément déprimé par cette séparation, Lotto finit par se construire, loin des siens. Etudiant charismatique, exubérant, au physique imparfait mais remarquable, doté d'un insatiable appétit sexuel, il enchaîne les aventures... jusqu'à sa rencontre avec Mathilde, la femme de sa vie, avec laquelle il se marie, provoquant les foudres d'Antoinette qui le déshérite, et qu'il ne reverra plus...


Les jeunes mariés ne se découragent pas : l'argent n'a pas d'importance. Mathilde travaille pour faire vivre le couple, encourage, soutient son mari et son immense besoin de reconnaissance, de devenir quelqu'un, organise et illumine les perpétuelles fêtes entre amis. Fidèle, infatigable, à la fois maîtresse et amie, elle devient son indispensable béquille, celle qui, dans l'ombre, le porte, le relève s'il tombe... Et Lotto passe enfin sous les feux de la rampe, mène la brillante carrière de dramaturge dont il a toujours rêvé. Lotto le flamboyant, qui semble naturellement fait pour la réussite et pour l'amour...


Et puis l'auteur opère un revirement. Après le recto, elle ausculte le verso, révélant l'ossature du couple, les accommodements de l'ombre, rendant à Mathilde sa fonction de colonne vertébrale, en même temps que sa singularité d'individu.


Ecrit par séquences, "Les furies" est un roman qui à la fois nous fait dévaler le temps au rythme de l’existence du couple Satterwhite, et nous immerge dans la densité résultant du regard, aussi tendre qu'ironique, que porte l'auteur sur ses personnages. Lauren Groff parvient ainsi, au gré des épisodes qui s’enchaînent, à dire l'essence du couple, cet équilibre qui tient au besoin qu'on a de l'autre, à la façon dont il nous voit et nous structure, mais aussi ces territoires qu'on ne lui a jamais dévoilés, ces fêlures que l'on tait, et qui pourraient, un jour, nous submerger...


Malgré une légère déception à la fin, à mon sens un peu tirée par les cheveux (Lauren Groff fait alors sortir trop de lapins de son chapeau), j'ai beaucoup aimé !


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