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Règne animal
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
La ruralité avec laquelle nous confronte Jean-Baptiste Del Amo n’a rien de bucolique. C’est d’abord celle du début du XXème siècle, dans une ferme modeste, un petit élevage porcin où le travail se fait encore à la main. Le paysan est réduit à sa fonction, son individualité vampirisée par le labeur auquel il est entièrement voué. Le quotidien est déterminé par d’immuables rituels transmis de génération en génération. Il reste d’ailleurs anonyme, désigné comme le père. Le monde intérieur de cet homme qui se tue à la tâche, vaillant et opiniâtre mais sans ambition, est passé sous silence -lui-même est un taiseux-. Il en est autrement de son corps façonné par la rudesse d’une existence dont les stigmates sont abondamment dépeints.
Le père vit avec l’épouse, femme bigote et avare, qui ignore la joie ou la tendresse, et qui impose sa férule puritaine et méprisante sur un foyer qui compte, hormis le couple, une fillette, la seule du trio à être nommée -Eléonore-, sans doute parce que c’est elle qui fera le lien avec les générations futures. Si cette dernière connait de rares moments de tendresse avec le vieux, elle sait ne devoir attendre aucune affection de sa mère, qui se contente de lui transmettre le savoir des tâches quotidiennes qui incombent à leur sexe. En grandissant, le père ayant fini par succomber à la maladie qui pendant de long mois lui a dévoré les poumons, Eléonore nourrit envers celle qu’elle ne considère que comme sa génitrice une haine et une défiance qu’elle entretient en silence.
Elle se rapproche en revanche de Marcel, le cousin venu les aider à tenir l’exploitation, jusqu’à ce que la guerre le lui enlève.
Jean-Baptiste Del Amo nous immerge littéralement dans cette rusticité crasse. Son écriture, en un flux aussi dense que précis, oppose sa profusion au mutisme de ses personnages. Il évoque la vie sous toutes ses formes -humaine, animale ou végétale- et sans les hiérarchiser, pourvoyant d’une langue cet univers sans parole mais riche de sons, et ne se contentant pas de ne décrire que le visible, puisqu’il porte aussi à notre attention les frémissements imperceptibles, les bruissements souterrains, les mécanismes de pourrissements à l’œuvre. Il nous collette ainsi avec une dimension organique qui prend des proportions parfois orgiaques, et souvent répugnantes.
Sous la plume de l’auteur, la ferme est un monde où s’entremêlent la vie, la mort et la copulation, royaume des excrétions et des puanteurs qui englobe naturellement l’homme, ainsi ravalé au rang de l’animal, comme le suggèrent certaines descriptions physiques -évoquant par exemple le cuir boucané de la peau- ou comportementales -l’épouse qui urine les jupes soulevées à même le tas de fumier, ou qui se débarrasse en quelques minutes du résultat d’une fausse couche qu’elle donne à manger aux cochons…-. Rien ne nous est épargné non plus de la violence qui régit le rapport aux animaux, la brutalité des châtrages, les coups donnés au chien avec tant de force qu’ils paralysent son arrière-train, les mises à mort sanglantes…
La deuxième partie nous projette au début des années 1980. La petite exploitation familiale est devenue élevage industriel. La descendance d’Eléonore cohabite dans une même maison. Ses deux petits-fils ont grandi dans la peur et le désir de satisfaire un père fruste et autoritaire. Tous trois s’échinent à la principale activité que requiert la porcherie, univers en perpétuelle expansion, immense infection qu’il s’agit de contenir et de contrôler : recycler la merde. Les bêtes sont confinées dans un entrepôt éclairé de lumières blafardes et artificielles, baigné d’un perpétuel fracas, où leur puanteur se mêle aux odeurs d’ammoniac.
Si la mécanisation a rendu les conditions de travail moins harassantes qu’au début du siècle, elles restent néanmoins très pénibles. Piégés par le cercle vicieux consistant à produire toujours plus pour rembourser les emprunts à l’origine de l’agrandissement constant de l’exploitation, les éleveurs sont pris à la gorge, broyés par le roulement désaxé d’un mécanisme fou qui alimente un vaste dérèglement dont l’élevage est au cœur, mais qui en même temps le dépasse.
"(…) la porcherie comme berceau de leur barbarie et de celle du monde."
Un texte puissant, qui vous met le cœur au bord des lèvres.
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