Glory hole
  • Date de parution 02/05/2019
  • Nombre de pages 305
  • Poids de l’article 300 gr
  • ISBN-13 9782711201020
  • Editeur ARENES
  • Format 205 x 124 mm
  • Edition Grand format
Romans français

Glory hole

2.82 / 5 (19 notes des lecteurs Babelio)

Résumé éditeur

C'est l'histoire de trois enfants, de leur promesse murmurée sous l'arbre d'un orphelinat de ne jamais se quitter. Mais les promesses n'engagent que ceux qui veulent bien y croire. Treize ans plus tard, Jean découvre une photographie de Claire dans un magazine pornographique américain. Le jeune homme veut la retrouver, et comprendre, à tout prix. Il entraîne Michel dans son obsession : direction Los Angeles, et ses anges déchus, où l'industrie du sexe prolifère. Pourquoi ne doutent-ils pas de la réalité de cette image corrompue ?Glory Hole évoque le dérèglement des vies inconséquentes, les teintes hurlantes des Eighties, l'âge des hommes, quelques mythes modernes, la lutte opposant ceux qui désirent aux foules envieuses.Glory Hole est une histoire d'amour.

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  • Date de parution 02/05/2019
  • Nombre de pages 305
  • Poids de l’article 300 gr
  • ISBN-13 9782711201020
  • Editeur ARENES
  • Format 205 x 124 mm
  • Edition Grand format

l’avis des lecteurs

Frédéric Jaccaud, romancier et nouvelliste suisse, n’est pas un inconnu chez Nyctalopes. Son précédent roman, Exil, a fait l’objet d’une chronique par Wollanup, qui saluait alors l’intransigeance de l’auteur, en le rapprochant d’un de ses contemporains, national celui-là : « tout comme Chainas, F. Jaccaud ne cherche pas à plaire, à être dans l’air du temps, d’écrire les romans qui plairont au plus grand nombre. Tout comme les romans de Chainas, ceux de Jaccaud se méritent et s’ils offrent un plaisir certain au fan, celui-ci s’obtient au prix d’une lecture qui peut parfois heurter, désarçonner, provoquer mais jamais ennuyer ou laisser indifférent. » En se plongeant dans ce cinquième roman, irrigué par un liquide organique glacial, on ne peut qu’approuver.

Début des années 1980, dans une petite ville portuaire française, peut-être baignée par les eaux grises de la Manche, Jean et Michel vivotent dans une petite délinquance, sans avenir. Leur amitié tortue est ancienne, elle remonte à l’orphelinat. Treize ans auparavant, ils se sont liés et se sont promis de ne jamais se quitter. Claire aussi était du serment. Mais elle a disparu. Ne reste d’elle que les photos qui maculent les revues et jaquettes de VHS porno arrivées d’outre-Atlantique. Ils n’ont pas oublié et veulent comprendre. Un braquage foireux les pousse à fuir, ils s’envolent pour Los Angeles, épicentre d’une nouvelle industrie qui part à la conquête du monde, le X. La ville brille et glace en même temps. Entre miséreux prêts à tout pour s’en sortir et riches anesthésiés par le cynisme et les drogues, Jean et Michel doivent avancer dans ce cloaque californien pour mener à bien une quête dont l’issue sera douloureuse pour tous.

Dès les premières lignes, on sait que l’auteur manie le scalpel, sous lumière crue et sans anesthésie. Il dissèque ce quelque chose qui ne marche pas droit et qui ne peut pas aller loin, coincé entre les falaises, pas loin de l’asphyxie, chez Jean et Michel, le beau et la brute, l’un qui tire et l’autre qui se laisse tracter. Jean a une fille sur le trottoir, deale, se crame la tête, se bagarre et se débat. Michel accompagne, suit et essaie en plus de vivre tant bien que mal une vie de couple. Ni l’un ni l’autre ne se satisfait vraiment de ce qu’il vit. Leur amitié a tout du poids mort, d’autant qu’elle a perdu une de ses roulettes, Claire. Dans leur tête à tous les deux, un obsédant jeu de tarot, illustré par des rêves de gosses, la nostalgie d’un élan physique, le mystère de la disparition de Claire et le vernis des photos porno.

Déjà peu enviable en France, la vie du duo, arrivé en Californie, ne sera pas reluisante. Au moins vont-ils pouvoir approcher pas à pas des milieux plus aisés, d’une terrifiante vacuité morale, pris dans un tourbillon hédoniste morbide, entre drogues et sexe. Des portes s’ouvrent vers l’univers du porno. Rien d’étonnant, ce qui fait exister la nouvelle industrie du X, c’est le fric. Elle n’est qu’un des derniers avatars en date d’un système économique qui use de cruauté et essore les humains contraints de s’y asservir. Frédéric Jaccaud ne manque ni de background documentaire ou philosophique ni de références (JG Ballard, George Bataille…). C’est pourtant quand elles apparaissent de façon trop évidente pour contribuer à une analyse ou une contextualisation que nous avons moins envie de le suivre. L’immersion grandissante des deux comparses dans les tournages révèle assez de saloperie glaçante. Jean, pourtant leader au départ, va perdre pied et Michel, étonnamment, relever le défi avec plus d’accomplissement. Mais il y a un prix à payer pour une vérité qui lamine le désir, l’amour et l’amitié.

« Sur la pochette d’une VHS, on les compare au couple burlesque formé par Bud Spencer et Terence Hill. Le corps esthétique de Jean se fait malmener par la caricature de son compagnon. Le rôle ingrat de Michel, brut, balourd, un peu idiot, se mue en catharsis pour une population masculine frustrée qui trouve une vengeance fictive dans les scènes où la disgrâce l’emporte sur l’élégance.

À présent Jean reproche à son ami d’avoir le beau rôle. Michel ne veut pas en parler. Il lui rappelle qu’ils ne sont pas véritablement acteurs. Il s’agit de retrouver Claire. Tout cela n’est qu’un moyen, pas une fin.

Jean ne l’entend pas.

En plus, tu y prends du plaisir.

Il faut avouer pour Michel, interdit, vexé, blessé, qui refuse d’admettre qu’il ne subit plus autant de déplaisir en jouant devant la caméra. Toutes les tensions accumulées de son enfance, jusqu’au crime irréparable, ce destin qui ne cesse de s’acharner, tout cela s’amenuise lorsqu’il entend la voix du réalisateur, cette voix qui lui ordonne chacun de ses mouvements, ordonne cette autre vie, futile et ridicule, qui tiendra sur une pellicule de quelques mètres. À cet instant, il n’est pas meilleur, pas pire que tous ces hommes nus et déchus, ahanant sur des corps inconnus, noyés dans les odeurs crues et les cris simulés, sous l’œil inquisiteur de l’objectif, sous le regard indifférent des techniciens. Lorsqu’il surprend le reflet de son anatomie dans l’un des miroirs installés autour de lui afin de faciliter le travail du caméraman, il éprouve enfin cette honte redoutée, retrouvant dans la souffrance morale la sensation d’exister. »

Une descente dans une vallée infernale, plus érosive qu’érogène.

Cultivant la discrétion comme credo, à l’extrême inverse de ces écrivains 2.0 occupant le devant de la scène, Frédéric Jaccaud est devenu, bon gré mal gré, l’une des voix dissonantes de la littérature noire helvétique en interpellant le lecteur avec des romans singuliers et dérangeants tout en s’interrogeant sur le monde qui nous entoure. Probablement s’agit-il d’une démarche similaire à sa fonction de conservateur qu’il occupe à la Maison d’Ailleurs à Yverdon qui explore les univers de la science fiction, des mondes utopiques et des voyages extraordinaires. Ne cherchant pas forcément à plaire, bien au contraire, Frédéric Jaccaud a pu heurter, voire même diviser son lectorat avec des ouvrages comme Hecate (Série Noire 2014) dont la structure narrative s’articule autour d’un fait divers terrible, ou comme Exil (Série Noire 2016) récit paranoïaque baignant dans les méandres du silicium alimentant une technologie numérique débridée. En suivant Aurélien Masson, l’ancien directeur de la collection Série Noire, chez Equinox – Les Arènes, Frédéric Jaccaud revient une nouvelle fois, là où l’on ne l’attendait pas, en explorant le monde de la pornographie des eighties avec Glory Hole, en lice pour le prix du Polar romand 2019 et qui risque bien de décontenancer quelques membres du jury et quelques lecteurs avertis, en découvrant un roman noir troublant et poignant à la fois, suscitant un certain malaise.

Il y a des promesses qui sont faites pour ne pas être tenues, comme celle de ces trois enfants qui ont juré, sous l’arbre de l’orphelinat, de ne jamais se quitter. Mais bien des années plus tard il ne reste de tout cela plus qu’un vague souvenir qui rejaillit à la vue d’une photographie de Claire étalant ses charmes dans une revue pornographique. Échoués dans une ville portuaire sans nom, Jean veut la retrouver à tout prix en entraînant Michel avec lui pour se rendre à Los Angeles, nouvel Eldorado du sexe qui se décline en format VHS. N’ayant plus rien à perdre, ces deux compères d'infortune vont franchir toutes les limites afin de découvrir ce qu’il est advenu de leur amie qui semble s’être volatilisée dans un environnement de perversions de plus en plus sordides. Quand les promesses deviennent chimères, les espoirs se fracassent aux pieds du Glory Hole. Jean et Michel vont l'apprendre à leurs dépens.

Sujet infiniment casse-gueule, l’exploration du monde pornographique peut donner lieu à une espèce de voyeurisme malsain couplé d’une violence complaisante pour faire frémir de dégoût quelques lecteurs en quête de sensation. Il n’en sera rien avec Glory Hole qui passe en revue, de manière parfois glaçante, cette frénésie du porno des années 80 que l’on consomme désormais sur cassettes VHS en nous interrogeant sur notre rapport avec l’écran avec un parallèle sur l'émergence du monde des jeux vidéos qui nous projette vers le repli et la solitude de l’individu, comme si les eighties incarnaient les prémisses de l'individualisme qui prévaut à notre époque. Une dissolution dans un nuage de pixels. Dans un tel environnement désincarné, bien loin du flash des néons et du scintillement des paillettes, on observe l'envers du décors avec ce coté sordide d’une industrie décomplexée qui laisse place aux pires dérives pour satisfaire les exigences de consommateurs pouvant désormais assouvir quelques ersatz de fantasmes en se dissimulant derrière l’écran de leur téléviseur.

Débutant comme un roman noir, on suit le parcours de deux paumés, Jean et Michel, dont la vie part à la dérive, dans l'indolence d'une cité sans nom qui semble les absorber jusqu'à la découverte de cette photo de Claire, leur amie qu'ils ont perdue de vue depuis tant d'années, malgré cette promesse d'enfant qui devient désormais un nouvel enjeu de retrouvailles. Une obsession apparaissant comme une étincelle dans le morne cours de leur existence qui les poussera au crime afin de financer leurs recherches. Une dérive qui se poursuit à Los Angeles, bien loin du rêve américain que l'auteur enterre définitivement au détour de scènes glauques où ses personnages évoluent à la marge d'un monde clinquant qu'ils ne distinguent que partiellement en côtoyant toute une galerie de laissés-pour-compte et d'individus douteux dont Frédéric Jaccaud dresse un portrait saisissant. Point de bascule du récit, les événements qui se produisent autour d'une séquence ultra violente du Glory Hole, symbole de l'obstacle qu'il faut surmonter, nous entraînent dans une autre dimension qui n’est pas sans rappeler l’univers déliquescent de J. G Ballard autour de sa trilogie de béton avec Crash ! (Folio 2007) son roman emblématique auquel Frédéric Jaccaud rend un hommage appuyé. Même la dynamique des personnages change puisque c’est désormais Michel qui prend l’ascendant sur Jean pour explorer cet univers dérangeant d’une démarche artistique morbide et obsessionnelle aux contours pornographiques meurtriers.

Il en résulte un récit désenchanté où l’amitié sera sacrifiée sur l’autel de l’émancipation pour se départir de vaines illusions faisant de Glory Hole un roman noir éprouvant et émouvant qui vous fera frémir jusqu’à la dernière ligne.

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