
Exil
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
EXIL est le quatrième roman du Suisse Frédéric Jaccaud et le troisième à la Série Noire après le terrible « La Nuit » et l’éprouvant « Hecate ». J’ai adoré ces romans tout en comprenant les réticences de certains, tant les histoires contées demandaient au lecteur d’être particulièrement en forme pour prendre dans la tronche et assimiler les propos de l’auteur. Tout comme Chainas, F. Jaccaud ne cherche pas à plaire, à être dans l’air du temps, d’écrire les romans qui plairont au plus grand nombre. Tout comme les romans de Chainas, ceux de Jaccaud se méritent et s’ils offrent un plaisir certain au fan, celui-ci s’obtient au prix d’une lecture qui peut parfois heurter, désarçonner, provoquer mais jamais ennuyer ou laisser indifférent.
«Le héros de ce roman n’a pas de véritable identité : quelques souvenirs d’enfance, des expériences dans l’informatique balbutiante de la Silicon Valley à l’orée des eighties, ensuite des années de galère jusqu’au moment où le temps s’accélère. Chauffeur pour une agence d’escort-girls, il se retrouve une nuit avec un cadavre sur les bras, une mystérieuse carte magnétique en poche, et des tueurs impitoyables à ses trousses.
Si on lui demandait, le héros dirait qu’il n’a fait qu’un pas ou deux de travers. Rien qui ne mérite un tel acharnement. Et pourtant, terré dans l’étrange petite ville de Grey Lake, il attire tous les regards. Désormais, le monde qui l’entoure se redéfinit radicalement par la technologie. À lui de comprendre s’il détient la clé d’un code source paranoïaque ou s’il n’est que le jouet de pouvoirs supérieurs. »
Débutant comme un thriller, Exil s’en démarque très vite dès que le héros en fuite se retrouve coincé dans un triste bled du nord des Etats Unis. Si Jaccaud nous avait emmené précédemment en Slovénie puis dans la région la plus septentrionale de la Norvège, ce coup ci, c’est l’Amérique qui va morfler que ce soit la Silicon Valley balbutiante de la fin des années 70 ou ce coin fictif tout pourri non défini du nord du pays.
« L’Amérique incarne à elle seule le plus vaste des mythes modernes. Le plus vaste et le plus clinquant. Dans sa géographie, dans son histoire tragique, dans ses icônes, dans sa brutalité régénératrice – parce qu’elle s’est abreuvée du sang de l’Antiquité, parce qu’elle s’est élevée sur la sueur d’hommes rejetés par le Vieux Monde. La mythologie nouvelle s’appuie sur le western, les super-héros et la conquête spatiale – transcendée par le culte de l’image et du cinéma. Le plus vaste et le plus fragile parce que l’édifice est constitué de carton-pâte, de plâtre et verrerie. »
Exil est avant tout un roman qui tourne autour de la paranoïa née de notre monde moderne qui nous propose via Internet toutes les informations que nous voulons ou plutôt que les élites veulent que nous assimilions. En intégrant à son histoire la Silicon valley à ses débuts où de jeunes hackers moitié génies, moitié toxicos ont rêvé puis créé une société où la culture, l’information seraient à la portée de tous, Jaccaud fait oeuvre pédagogique tout en montrant l’inquiétude de tous les dirigeants du monde occidental pour cette révolution de la connaissance pour tous. On sait maintenant que tous ces grands rêveurs n’ont pu mener à bien leur vaste entreprise puisque très tôt les élites ont conditionné, modifié, supprimé les messages qui arrivaient au commun des mortels. En fait, ce thème du livre est une sorte de préquel de « la nuit » qui montrait de manière intelligente les dérives de l’information et les dangers non visibles du Net.
Exil brosse aussi un tableau peu ragoutant des Etats Unis. Tout d’abord, la Silicon Valley, où de jeunes junkies, dans leurs garages expérimentaux, tentent de créer un nouveau monde en se cachant des officines étatiques officielles tel que le FBI et d’autres plus anonymes mais au service de personnes et de sociétés puissantes conscientes qu’un danger de démocratisation sauvage de l’information les guette et peut les mener à la perte de leur hégémonie. Puis le trou du cul des States de Grey Lake, avec ses hordes de dégénérés travaillant à la scierie locale et invitant à des pages dignes de Zola.
Progressivement, les certitudes du lecteur se barrent et les infos distillées par l’auteur sont autant de chausse-trappes, identiques aux épreuves vécues par notre héros. Et cela va crescendo jusqu’à un déchaînement final où chacun cherchera et trouvera sa vérité sans réellement savoir si elle est réellement valide. Thriller certainement pas, roman noir intelligent sans aucun doute. Tout au long de l’histoire, on sent la réflexion de l’auteur, ses recherches sur le sujet. Les référents cités Philipp K.Dick, Allen Ginsberg, William Burroughs prouvent s’il en est besoin, le sérieux et la profondeur du travail mais on peut très bien suivre sans rien y connaître à la pensée de ces auteurs.
Il me semble aussi important de dire que connaissant déjà l’auteur, j’ai néanmoins été très surpris par le niveau d’écriture de Frédéric Jaccaud sur ce roman qui est absolument époustouflant. De nombreuses passages sont à couper le souffle tout comme sont magnifiques certains passages parlant de l’enfance du héros.
Thriller, délire paranoïaque, folie furieuse ou version moderne de « l’Utopie » de Thomas More « Le texte se comprend à la fois comme fiction et espace théorique. L’utopie est un terme ambigu qui définit en même temps un lieu incertain et le lieu du bien » telle que la définit l’auteur dans un abécédaire en fin d’ouvrage? Chacun, à l’aune de ses décryptages, trouvera sa vérité sur le roman.
Intelligemment codé, polar original qui se mérite.
Le lien entre l’homme et la technologie devient de plus en plus complexe au regard de l’évolution et du perfectionnement de ces outils désormais indispensables que sont les téléphones portables, tablettes, ordinateurs et autres appareils électroniques qui investissent chaque jour un peu plus notre quotidien, sans que l’on ne s’en rende vraiment compte. C’est par le biais de nos données que l’on diffuse journellement sur les canaux numériques, et qui sont rassemblées sous la fameuse dénomination floue de « big data » que l’on commence à se poser quelques questions sur notre capacité à prendre la pleine mesure de la puissance de ces instruments et de ceux qui savent en exploiter tous les éléments. Dans ce contexte, au travers d’un polar anxiogène flirtant sur le genre du thriller, Exil de Frédéric Jaccaud pose le postulat effrayant de savoir si l’homme peut encore maîtriser cette technologie qu’il a créée.
A l’exception de vagues souvenirs d’enfance, il n’a plus de passé, plus d’avenir, plus de nom. Il est en exil. Déconnecté du monde numérique, il est chauffeur pour une agence d’escort girls et surfe sur les routes de Los Angeles en conduisant les filles au gré de leurs différents rendez-vous. La lecture comble l’attente, l’ennui, la vacuité d’une vie sans relief jusqu’à ce que Peggy Sue revienne de son rendez-vous tarifié en lui remettant une carte magnétique avant de succomber à ses blessures. Poursuivi par des tueurs déterminés il échoue dans l’étrange petite ville de Grey Lake. Quels secrets renferment cette agglomération et cette mystérieuse carte magnétique ? Et que recèle ces étranges messages codés qu’il retrouve sur les cadavres qui jalonnent sa route ? D’un exil à l’autre, il est des errances sans fin.
De l’imaginaire à l’utopie jusqu’à sa concrétisation, du rêve bricolé dans un garage jusqu’à la réalité d’un consumérisme aussi aveugle qu’effréné, Frédéric Jaccaud pose un regard désenchanté, presque amer, sur ce parcours numérique qu’il questionne. Exil est un roman étrange qui s’installe sur la vague du polar en oscillant sur les rivages du thriller pour nous conduire subtilement sur la bordure de l’anticipation en faisant la part belle aux références, comme Burrough, Philip K. Dick et Gibson dont l’un des romans accompagne cet énigmatique protagoniste sans nom. On pense aussi au regretté Dantec qui nous a quitté récemment. Une abondance d’influences donc, qui émanent probablement de la Maison d’Ailleurs à Yverdon, musée de la science fiction et des voyages extraordinaires dont l’auteur est le conservateur et dont on perçoit une infime richesse avec cet abécédaire que l’on découvre en fin d’ouvrage permettant ainsi au lecteur de prolonger ses réflexions ou d’appréhender l’histoire sous des prismes différents.
L’intrigue débute avec une scène d’action qui se déroule sur un très court instant, mais qui jalonnera tout le récit comme pour incarner cette relativité du temps ou cette métrique logicielle que l’on perçoit au travers des lignes mystérieuses de ces étranges codes qui émaillent la narration. Une interruption brutale puis l’auteur nous invite dans l’environnement de cet homme sans nom qui circule dans les artères de Los Angeles dont l’urbanisme présente toutes les similitudes avec ce circuit imprimé qui illustre la couverture de l’ouvrage, évoquant le souvenir lointain d’un film comme Tron où l’homme se glisse au cœur de cette architecture numérique. L’individu semble posséder des compétences dans le hacking, mais a désormais retiré la prise de la machine qu’il possède et qui le relie à ce passé comme un cordon ombilical. Un homme éteint, un programme en latence ou incarne-t-il Sadziak, étudiant surdoué, pionnier de cette ère numérique où l’on met au point des machines capables de communiquer avec d’autres machines sans percevoir les implications qu’elles peuvent engendrer par le biais d’un langage codé ? Ainsi, sur un rythme nonchalant, Jaccaud dépeint cette évolution désenchantée d’un environnement désincarné. Puis, de poursuites trépidantes en fusillades percutantes, tout s’accélère jusqu’à ce que l’on découvre la ville de Grey Lake, incarnation parfaite de ces agglomérations servant de décor pour la Quatrième Dimension. Dans cet univers baigné de quiétude, notre héros aspire à nouveau à l’oubli, malgré un climat étrange teinté d’une certaine paranoïa.
Finalement, Exil peut se présenter comme un immense code que le lecteur déchiffrera au gré de ses propres connaissances et de ses propres références ; il déchiffrera aussi, à sa manière, ce roman érudit, à l’écriture maîtrisée, fluide, tout en élégance, et où le visuel omniprésent permet de s’immerger dans les méandres d’un récit énigmatique. Ainsi la réalité côtoie le virtuel dans une oscillation entre les délires paranoïaques et la lucidité troublée d’un homme qui ne parvient plus à définir la périphérie entre le réel et l’imaginaire dans laquelle il se situe.
Dans un registre différent par rapport à Hécate (Gallimard, 2014), on ressent ce même malaise et ce trouble, qui s’invite dans un climat délirant propice à toutes les interprétations que susciteront notamment ce mystérieux portrait qui achève un récit où les questions se heurtent au silence obstiné d’un monde numérique que l’on ne comprend plus.
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