Le Quai de Ouistreham
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
Quatrième de couverture
" La crise. On ne parlait que de ça, mais sans savoir réellement qu'en dire, ni comment en prendre la mesure. Tout donnait l'impression d'un monde en train de s'écrouler. Et pourtant, autour de nous, les choses semblaient toujours à leur place. J'ai décidé de partir dans une ville française où je n'ai aucune attache, pour chercher anonymement du travail. J'ai loué une chambre meublée. Je ne suis revenue chez moi que deux fois, en coup de vent : j'avais trop à faire là-bas. J'ai conservé mon identité, mon nom, mes papiers, et je me suis inscrite au chômage avec un baccalauréat pour seul bagage. Je suis devenue blonde. Je n'ai plus quitté mes lunettes. Je n'ai touché aucune allocation. Il était convenu que je m'arrêterais le jour où ma recherche aboutirait, c'est-à-dire celui où je décrocherais un CDI. Ce livre raconte ma quête, qui a duré presque six mois, de février à juillet 2009. J'ai gardé ma chambre meublée. J'y suis retournée cet hiver écrire ce livre. ", Florence Aubenas.
Mon avis
Ayant lu «Tête de turc » et «Dans la peau d’un chinois », il était intéressant pour moi de découvrir ce livre.
Non pas pour comparer car les situations sont malgré tout différentes, mais pour avoir une fois encore, un regard de « l’intérieur » sur des faits que nous ne pouvons ignorer …
Florence Aubenas a donc glissé ses pieds, ses mains, ses bras et tout son corps dans la peau des techniciennes de surface, femmes de ménage ou autres appellations ….
Elle a pris sur elle pour vivre leur quotidien, avec les difficultés qui y sont liées : logement, alimentation, transport mais aussi les bons côtés: la solidarité, l’écoute, le partage …
Elle a rencontré les employés de Pôle Emploi pour qui elle était « le fond de la casserole », les files d’attente interminables, les personnes qui vous écoutent à peine.
Elle a connu les matins où au bout de 2h 30 de nettoyage, elle avait l’impression d’avoir une journée complète dans les jambes. Elle été humiliée, critiquée, de ne pas aller assez vite, de ne pas faire correctement mais elle a également rencontré des êtres humains, certainement plus humains que quelques grands patrons …
Être transparente, avoir l’impression de n’être que le prolongement d’un aspirateur (une des scènes est édifiante, elle est là avec son appareil mais on ne la voit pas, on ne l’entend pas, elle fait partie du décor) …. Tout cela, elle l’a découvert, ressenti au plus profond d’elle-même et elle a su le transmettre d’une écriture simple et régulière à travers une galerie de portraits et de situations diverses.
Je crois qu’au-delà de la souffrance physique, des horaires malaisés, des dos et des nuques raides, ce qui est le plus ardu à vivre, c’est la peur du lendemain.
Ne pas pouvoir refuser deux heures de labeur, à l’autre bout du département parce que « si tu dis non une fois, on t’oublie et c’est fini. », ne pas être sûre d’être reprise pour une autre mission parce qu’on ne va pas assez vite, parce que ça ne brille pas assez ….
Et là, Florence Aubenas sans pathos, sans misérabilisme a su parfaitement être la porte parole de ces femmes.
Il y aura forcément des esprits chagrins qui feront remarquer qu’après, elle a retrouvé sa vie de femme aisée, n’ayant pas de problème d’argent …. D’autres qui diront « Qu’est ce que ce que ça a changé d’avoir écrit ce livre ? »
Je répondrai simplement :
Peut-être rien pour les uns …
Peut-être tout pour d’autres ….
2008, année de LA crise. Florence Aubenas veut rendre compte de cet événement, qui donne l’impression que le monde est en train de s’écrouler, mais n’arrive pas à le saisir. Elle décide alors de mettre sa vie de journaliste entre parenthèses, pour se transformer en chercheuse d’emploi anonyme. Elle choisit de s’installer -dans une petite chambre meublée- à Caen, ville idéalement moyenne, qui a subi comme tant d’autres, avec la mort de son industrie, le déclin économique et la paupérisation de sa population. Elle arrêtera sa recherche le jour où elle décrochera un CDI. D’emblée, faisant le tour des agences d’intérim, elle prend la mesure des difficultés qui l’attendent lorsqu’elle s’entend répondre, ayant annoncé "tout accepter", "qu’ici tout le monde accepte tout", et qu’en ce moment, "il n’y a rien". D’autant plus que l’histoire qu’elle associe à son personnage (celle d’une femme quittée par un mari garagiste, n’ayant jamais eu besoin de travailler) la place en bas de la hiérarchie des demandeurs d’emploi : sans expérience, sans moyen de locomotion, elle ne peut rentrer dans la catégorie des "Risque Zéros", c’est-à-dire les seuls auxquels font appel la plupart des agences, même pour les travaux les moins qualifiés.
Elle finit néanmoins par obtenir quelques missions en tant que femme de ménages, dont une sur le ferry-boat de Ouistreham, dont elle nettoie aux aurores, entre deux fournées de passagers, les cabines et les sanitaires.
C’est une armée de l’ombre qu’elle intègre, très majoritairement féminine, une main-d’œuvre corvéable à l’envi, disponible tôt le matin et tard le soir, le week-end et les jours fériés, cumulant pour un salaire de misère des vacations d’une à trois heures et des horaires découpés, se déplaçant d’écoles en bureaux, de collectivités en commerces. Tout cela nécessite une organisation compliquée, plombée par l’angoisse que la précarité inscrit sur des événements a priori anodins (une voiture qui tombe en panne ou une rage de dents que l’on ne soigne pas parce qu’on ne connaît pas de médecins acceptant les patients CMU, et c’est la catastrophe), mais c’est le prix à payer pour avoir du travail. Alors on ravale ses protestations lors des heures non payées parce qu’on a dépassé le temps alloué pour finir un chantier, on se transmet les combines pour économiser quelques sous sur un quotidien déjà austère, et on accepte sans regimber les réductions de salaire ou la suppression d’infimes avantages parce qu’on est pris à la gorge, et qu’il s’agit de s’inscrire dans la loi du marché, en étant productif à bas coût. Et il faut encore subir les absurdités administratives, le temps perdu dans les rouages d’un Pôle Emploi où même les entretiens sont dorénavant chronométrés, où le demandeur d’emploi est devenu un client, parce que "l’époque du social, c’est fini, il faut faire du chiffre"…
Et ce n’est pas au travail que le regard de l’autre permettra de reconquérir quelque fierté, entre ceux qui vous parlent avec mépris en vous demandant de faire des miracles, ceux qui ne vous voient même pas et s’appliquent, quand l’échange devient indispensable, à ne pas croiser votre regard, les paternalistes ou les faussement bienveillants qui se plient en réalité comme les autres au seul impératif de rendement, occultant l’infaisabilité des consignes qu’ils donnent. Travailler, tout en se faisant oublier, sans révolte ni ambition, capitalisant sur des rêves modestes et à court terme, quand on a le temps d’avoir des rêves. Des travailleurs du bas de l’échelle, dont l’emploi morcelé ne permet ni recul ni union. A l’inverse d’un défunt monde ouvrier où la conscience de classe et les organisations syndicales fédéraient autour d’une lutte commune, on est là dans le territoire de l’apolitisme et de l’immédiat.
La dimension sociale, économique, émerge naturellement de la description par Florence Aubenas de son quotidien parmi eux. Car "Le quai de Ouistreham", plus qu’un reportage, est un véritable témoignage. C’est dans la peau d’une chercheuse d’emploi et d’une travailleuse que l’auteure évoque cette expérience, s’oubliant en tant que journaliste pour laisser toute la place à son sujet, et c’est la sincérité que rend cette complète immersion qui rend son récit édifiant puisque parfaitement crédible, dégraissé de toute analyse qu’induirait une prise de distance. Et c’est aussi ce qui lui permet de donner chair aux femmes et aux hommes qu’elle côtoie durant ces mois, nous immergeant dans l’agitation du travail d’équipe, avec le raffut des seaux qui s’entrechoquent et des chariots que l’on fait cavaler dans les couloirs, évoquant les rivalités mais aussi l’entraide, la fugacité de la plupart des relations que l’on noue dans ce milieu de la précarité et du turnover mais aussi les belles rencontres que permet ce monde hétéroclite où orbitent les représentant(e)s de cette France d’en bas qu’elle sort, un instant, de l’anonymat. Ainsi Victoria, retraitée dont elle fait la connaissance lors d’une manifestation, et qui lui sauve la mise à plusieurs reprises, Philippe, croisé sur un salon de l’emploi, avec sa gentille vanité et ses tentatives de séduction grossières mais jamais incorrectes, ou encore Mimi le transsexuel, Marilou et son mal de dents, Françoise et toutes les autres…
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