Versus
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
Voici, après "Une histoire d'amour radioactive", le deuxième roman que je lis d'Antoine Chainas. J'y ai retrouvé cette capacité de l'auteur à installer une atmosphère extrêmement sombre et désespérée.
A l'inverse de certains romans noirs où le lecteur est soumis à une tension grandissante au fil de l'intrigue, le sentiment d'accablement est ici constant, et fait partie intégrante du récit. Le caractère sordide et obscur du monde que dépeint Antoine Chainas ne semble pas être un moyen d'étoffer son histoire d'une ambiance pesante. Il apparaît juste comme étant la composante essentielle et par conséquent incontournable de l’environnement -le nôtre ?-dans lequel évoluent ses héros.
Il faut avouer que lorsque l’on regarde ce monde à travers les yeux de Paul Nazutti, l'un des principaux personnages de "Versus", toute éventuelle poussée d'optimisme est exclue. Ce major de police voue à l'ensemble de l'humanité une haine inextinguible. Il ne supporte ni les homosexuels, ni les étrangers, ni les femmes, ni les touristes, ni qui que soit, d'ailleurs, mais surtout, Paul Nazutti ne supporte pas les pédophiles et les tueurs d'enfants, contre lesquels il est en chasse. Et comme tout chasseur qui se respecte, il est devenu, afin de peaufiner sa technique, un expert "ès pédophiles", dont il fréquente les milieux, et dont il connaît les pratiques, les fantasmes, les habitudes.
La lutte contre les criminels d'enfants impliquant d'être sans cesse sur le pied de guerre, le major, pour s’y consacrer entièrement, s'interdit toute distraction, tout bonheur. Disons qu'il s'interdit de vivre, en somme.
A ses côtés, l'inspecteur Andreotti vient de réintégrer la police après deux ans d'arrêt maladie motivés par sa mise au placard à la suite d'une affaire impliquant des représentants de l'ordre qu'il avait eu la mauvaise idée de vouloir faire inculper. Nazutti va initier son nouvel équipier à sa conception du monde, ainsi qu’aux aux sombres secrets que recèle la vie nocturne et souterraine en milieu urbain. Car si Nazutti est un chasseur, son terrain de chasse est la Ville, non pas celle qui offre aux estivants un visage ensoleillé et paisible, mais celle qui, reine des tentations, offre la possibilité d'assouvir toutes les pulsions, tous les fantasmes, de contenter toutes les déviances. Celle où tout s'achète et tout se vend, l'humain comme le reste.
C'est ainsi qu'à l'occasion d'une enquête visant à interpeller un assassin de pédophiles, les deux policiers vont évoluer dans les bas-fonds de la cité et rencontrer des personnages peu fréquentables, dans une descente aux enfers dont ils ne pourront sortir indemnes.
C'est d'une noirceur à peine supportable, à couper le souffle...
Je me suis même demandée par moments comment l'auteur parvenait à exprimer tant d'horreur et de désespoir sans devenir fou !
Il dépeint une société malade, gangrenée par les frustrations des uns, les perversions des autres, par la folie, la bestialité, une société où le bonheur semble impossible, où les faibles sont en danger permanent.
Mais en même temps, je suis complètement admirative : Antoine Chainas donne à ses personnages une ampleur hors du commun sans jamais tomber dans la caricature, parce qu'il sait aussi les doter d'humanité, et il fait preuve dans la description de leurs états d'âme d'une telle puissance d'évocation, que l'on sort de cette lecture comme hébété, et à la limite de la nausée...
C'est très fort (dans tous les sens du terme), et je ne peux que dire : bravo !
Un monstre. Un véritable incendie. Une gifle. C’est Versus, d’Antoine Chainas.
Le major Paul Nazutti de la Brigade des mineurs est en guerre contre le monde entier. Les arabes, les fachos, les touristes, les toubibs, les syndicalistes, les politiques, les homos, les femmes, les gauchistes, les étrangers, les français, les parents, les pauvres, les riches, les autres flics, les juges, les avocats … la liste est sans fin. Il est surtout en guerre contre les pédophiles. Et pour Nazutti, en temps de guerre, tout est permis. Tout. En général ses partenaires ne durent pas, et démissionnent après un ou deux ans. Au mieux. Au pire ils restent sur le carreau. Aujourd’hui il traque un tueur qui abat des pédophiles, et les enterre auprès du cadavre de leur dernière victime. Andreotti, jeune flic fragile qui sort d’une affaire particulièrement pénible supportera-t-il d’être son nouveau binôme ? Et pourquoi Rose, qui a tout perdu vingt ans plus tôt, sa fille tuée par pédophile, son boulot, son mari qui l’a lâchée, semble-t-elle liée au tueur ?
Nazutti est incandescent. Un bloc de haine et de violence. Tous ceux qui l’approchent se brûlent. Personnages comme lecteur. Cela amène d’ailleurs à se poser la question de l’auteur. Comment a-t-il pu vivre avec un tel monstre sans en payer les conséquences ? Ceci n’est pas un jugement de valeur. Je ne prétends pas que cela rende le livre meilleur ou pire que d’autres. C’est une constatation.
Ce qui est certain c’est qu’il faut un sacré talent pour arriver à un tel résultat. Le lecteur peut soit fuir et refuser le choc, soit rester scotché, fasciné, happé. Et hanté. Car on ne peut plus oublier Nazutti. Avec lui on plonge au plus sombre, au plus crade de l’âme humaine. Il est à la fois un repoussoir, concentré de toutes les haines et généralités imbéciles, et une force, une intégrité, et même, pourquoi pas, une humanité, mais une humanité dure comme le silex. Repoussant, effrayant, et fascinant.
Avec lui on explore l’envers d’une ville touristique de la côte méditerranéenne et l’auteur dresse le portrait sans concession d’une société sans âme, sans valeurs, sans morale, uniquement basée sur l’apparence, la futilité, la consommation effrénée (du sexe comme du reste) et le fric. Au cœur de ce maelstrom il tresse une intrigue beaucoup plus élaborée et serrée que dans son premier roman. Une intrigue qui attrape le lecteur pour ne plus le lâcher.
Avec ce second roman, Antoine Chainas s’affirme comme une des voix les plus puissantes et les plus originales du polar français. A défaut d’être une des plus aimables ! Petit extrait, pour que vous soyez avertis de ce qui vous attend :
« Le major entra dans l’hôpital au pas de charge. Il le connaissait par cœur. Tous ceux qui survivaient aux faits divers de la mégapole atterrissaient ici. Pour un temps du moins.
Il y avait les viols, les plaies par balles, les blessures par arme blanche, les coups de tête, les passages à la batte de base-ball.
Il y avait les tentatives de suicide, veines fendues et médocs plein la tronche. Les coups de fusil, les morsures animales et humaines, accidentelles et volontaires.
Il y avait la stupidité absolue des imprudents.
Il y avait de la médiocrité, de la crasse et des larmes.
Des accidents de la route, des fractures ouvertes, des côtes broyées, des traumatismes crâniens et des hémorragies internes.
Il y avait du blanc, du rouge, du jaune, du bleu et du violet : toutes les couleurs du sang sous la peau.
Il y avait de la salive, des sécrétions vaginales, du pus, de la pisse et des restes d’os pulvérisés. De la vermine dans les plaies.
Il y avait des pleurs, de l’abattement, de la confusion et de la colère.
Il y avait la mort, partout, en filigrane.
Mais de salut point.
Ce n’était pas un endroit où l’on soignait les gens.
Ce n’était pas un endroit où l’on s’occuperait de toi, où tu pouvais te dire que tu serais considéré comme un être humain.
C’était une usine. Un lieu de passage d’où, si tu ne mourrais pas, on te rejetait au plus vite, là-bas, dans le grand bordel du monde extérieur, celui-là même qui t’avait amené ici.
Pour libérer des lits.
Du temps et de l’espace.»
Après ça, repos. Je passe à du léger, du divertissant. Le dernier Elmore Leonard fera parfaitement l’affaire.
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