
Rosine, une criminelle ordinaire
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l’avis des lecteurs
Chroniqueur spécialiste du roman noir et policier, traducteur et écrivain, Maurice-Bernard Endrèbe a fondé en 1948 le Grand Prix de Littérature Policière qu'il a présidé jusqu'à sa mort en 2005. Dans le domaine, il s'agit de l'une des grandes références célébrant le genre qui se distingue par l'impressionnante liste des récipiendaires à l'instar de Manchette, Frédéric Dard, Léo Malet, Tito Topin, Patricia Highsmith, Giorgio Sabernenco, Elmore Leonard, Hervé Le Corre, James Sallis et Ron Rash pour n'en citer que quelques uns. Mais loin d'enfoncer des portes ouvertes, le Grand Prix de Littérature Policière célèbre des auteurs méconnus en contribuant ainsi à une reconnaissance du public comme il le démontre pour l'édition 2021 où il distingue pour la catégorie étrangère, L'Eau Rouge, premier roman policier croate traduit en français de Jurica Pavičić et pour la catégorie française, Rosine Une Criminelle Ordinaire de la primo-romancière Sandrine Cohen qui connaît un succès impressionnant avec des ruptures de stock régulières lors des dédicaces dans les différents salons du polar où elle est présente, à l'exemple de Toulouse Polars du Sud.
Il y a la routine, le quotidien d'une femme ordinaire qui bascule soudainement sans que l'on ne comprenne ce qui a poussé Rosine Delsaux, mère aimante et amie admirable, à noyer ses deux petites filles lors du bain. La dynamique du fait divers se met alors en place avec une femme meurtrie ne contestant pas le double homicide qu'elle a commis. En prison, elle se mure dans le silence et la culpabilité en laissant un mari désemparé et un père rongé par la colère. Mais après l'enquête de police établissant sans aucun doute la culpabilité de la mère de famille, c'est au tour de la justice d'entrer en action avec Clélia Rivoire, enquêtrice de personnalité auprès des tribunaux qui doit déterminer les raisons pour lesquelles Rosine a commis un tel acte. Investigatrice sensible, à fleur de peau, Clélia va s'immiscer dans l'intimité de la famille afin de déterrer les traumatismes et les secrets d'hommes et de femmes accablés par les événements et qui peinent à se confier.
Avec l'obtention d'un tel prix, c'est également l'occasion de mettre en lumière les éditions du Caïman, une petite maison stéphanoise indépendante qui publie de la littérature noire depuis plus de dix ans en se consacrant exclusivement aux auteurs francophones. Mais pour en revenir à l'ouvrage de Sandrine Cohen, on saluera tout d'abord le fait que le récit soit résolument orienté sur les codes du roman noir en se concentrant sur les raisons qui ont poussé une mère de famille ordinaire à commettre un double infanticide. Le crime se suffisant à lui-même dans le domaine du sordide, on appréciera également le fait que la romancière ne s'étale pas trop sur le déroulement des événements aussi terribles soient-ils et préfère jeter un voile de pudeur sur l'atrocité du crime pour se concentrer sur la personnalité des personnages et plus particulièrement de Rosine, bien évidemment, mais également de Clélia Rivoire qui va tenter de décortiquer les aspects sous-jacents de ce fait divers, ceci pour le compte de la justice qui doit juger cette meurtrière. A certains égards, les deux femmes présentent quelques similarités dont des secrets enfouis qui ont altéré leur trajectoire respective. Pour Rosine, on devine quelques secrets de famille que Clélia Rivoire va devoir déterrer envers et contre tout avec l'aide du juge d'instruction Isaac Delcourt qui apparaît comme son mentor, protecteur et père de substitution, mais également avec l'appui de l'inspecteur Samuel Varda chargé de l'enquête policière et dont l'interaction parfois acide avec la jeune enquêtrice auprès des tribunaux apporte un certain dynamisme au récit. Pour ce qui est de Clélia, le lecteur devra patienter pour entrevoir les failles qui entourent ce personnage à fleur de peau, ce qui est regrettable. On aurait aimé mettre en perspective le drame qui a touché cette femme à la fois forte et sensible avec les éléments qu'elle met à jour au gré de ses investigations dans l'entourage de Rosine. Néanmoins, Sandrine Cohen, comme bon nombre d'auteurs, a choisi d'opter pour une arche narrative entourant son personnage central que l'on retrouvera sans nul doute dans un prochain roman et dont on découvrira quelques éléments saillants de sa trajectoire auquel la romancière fait allusion.
La particularité de Rosine Une Criminelle Ordinaire est de se concentrer sur l'aspect judiciaire du crime avec un enjeu central qui tourne autour du jugement et de la sanction en fonction des circonstances que l'on va découvrir peu à peu au cours du récit. Ainsi, la dernière partie de l'intrigue se focalise sur la joute oratoire entre la plaidoirie de l'avocate de Rosine et le réquisitoire du procureur chargé de l'accusation avec une atmosphère chargée de suspense qui relègue malheureusement Clélia Rivoire au second plan ce qui déséquilibre quelque peu la dynamique du récit sans pour autant gâcher l'ensemble d'un roman explorant avec sensibilité les contours d'un fait divers terrible qui va bouleverser l'ensemble d'une famille moins ordinaire qu'elle ne le laisse paraître.
Quatrième de couverture
Un jour, Rosine Delsaux, une femme, une mère, une amie parfaite, tue ses deux filles. Elle les noie. Elle ne sait pas ce qui s’est passé, comment a-t-elle pu faire ça. Il y a forcément quelque chose dans la vie de Rosine qui a « permis » ce crime. Avec l’aide de Rosine, Clélia, enquêtrice de personnalité auprès des tribunaux, va rechercher quoi.
Mon avis
Juger c’est comprendre.
Rosine est divorcée, elle vit avec ses deux filles et son nouveau compagnon, plus jeune qu’elle. Un jour, l’indicible, l’inacceptable se produit, le trou noir : elle noie les fillettes dans leur bain. Comment a-t-elle pu agir ainsi, qu’est-ce qui peut expliquer un tel geste ? Est-il nécessaire de chercher à comprendre l’horreur ? Clélia Rivoire est enquêtrice de personnalité, elle va interroger famille, amis pour essayer de cerner Rosine, décrypter ce qu’elle est pour que le jugement soit le plus juste possible. Oui, Rosine est coupable mais quelle peine lui infliger ? La justice ne prend pas en compte le mécanisme du déni, du black-out, pourtant déchiffrer ce qui est invisible aux yeux, lever le voile sur ce qui a pu provoquer cet acte est important.
Rosine a tout de la mère parfaite, donc personne ne sait pourquoi elle en est arrivée à tuer ses enfants. Clélia est persuadée qu’il faut aider Rosine à extraire du plus profond ce qu’elle ne sait pas d’elle. Ce qu’elle a peut-être enfoui, oublié ou effacé. Pour arriver à ses fins, l’enquêtrice peut aller loin, trop loin parfois, mais elle est entière, elle ne peut pas lâcher. Bien sûr, elle prend les choses trop à cœur, ça l’envahit, il lui est difficile de mettre de la distance. C’est une femme volontaire, engagée, borderline mais terriblement efficace, « une justicière de la justice ». Forte et fragile à la fois, secrète, farouche, à fleur de peau, « elle a la force des êtres en détresse ». Elle pousse chacun dans ses retranchements, elle ne s’épargne rien, quitte à se mettre en danger, en oubliant les règles.
Ce roman a été pour moi une véritable claque. Je n’aurais jamais pensé à analyser un fait divers aussi affreux avec les yeux de Clélia. On a tous une idée de la justice, qu’y-a -t-il de plus terrible que la mort d’un enfant, de surcroît tué par sa génitrice ? On ne peut pas excuser. Et là, on nous propose de faire le point sur le passé, de l’explorer afin de libérer la parole…
L’écriture de l’auteur est puissante, profonde, elle fouille les âmes (y compris celle du lecteur qui se sent interpellé). Le récit vous hante, votre cœur balance entre l’envie de châtier celle qui a osé donner la mort et le besoin transmis par Clélia de déchiffrer le pourquoi. Cette ambivalence est très intéressante, elle est même le nœud gordien (bien qu’il n’y ait pas d’action radicale). Les phrases sont courtes, elles frappent à la tête et au cœur, elles font mal mais tout ce qu’elles transmettent apporte un éclairage nouveau, donnant du sens à tout ce qui s’est passé.
Cette lecture m’a bouleversée, Sandrine Cohen dissèque, observe, gratte où ça fait mal. Elle présente une interprétation de la situation de départ qui est impressionnante de finesse. Comédienne, réalisatrice de documentaires et de fictions, photographe, doubleuse de films, chroniqueuse, elle signe là, un premier roman noir abouti, totalement bluffant.
Au-delà des apparences
Le pitch
Le 6 juin 2018 à Aubervilliers, dans un appartement lambda, Rosine, 35 ans, noie ses deux filles de 6 et 4 ans dans la baignoire. L’atroce double infanticide étant posé dès le prologue, sans complaisance, la suite est consacrée à la tentative de comprendre l’indicible. Que s’est-il passé dans la tête de cette mère, jusque-là admirable à tous égards ? Un roman noir, éprouvant, sensible qui cherche à aller au-delà des apparences, à saisir l’incompréhensible, dans une quête absolue de justice. Une première œuvre remarquable.
Pourquoi je vous le conseille ?
Parce qu’avec un tel sujet, rebutant, insoutenable, que j’ai abordé avec une immense réticence, Sandrine Cohen arrive à nous embarquer dans un récit passionnant, profondément humain tout en conservant un regard distancié. Pour ses personnages abîmés, écorchés, qui bousculent certaines de nos certitudes. Parce que son autrice, scénariste, réalisatrice de fictions et documentaires, fascinée par le fait divers et les mécanismes du passage à l’acte meurtrier, nous transmet sa passion entre les lignes. Car c’est l’un des textes noirs français parmi les plus forts de 2021.
POUR ROSINE. Une mère aimante et une amie admirable qui commet un jour l’irréparable. Une femme meurtrie qui ne conteste pas le double homicide qu’elle a commis et qui fait d’elle soudainement « une criminelle ordinaire ». Comment peut-on noyer ses deux petites filles de 6 et 4 ans sans être un monstre ? Comment ne pas condamner cette femme dès les premières pages ni avoir envie de refermer immédiatement l’ouvrage tant le crime est violent ? Parce qu’on est rapidement embarqué dans un récit qui dépasse l’infanticide pour se concentrer sur l’aspect judiciaire du crime avec au cœur le jugement et la sanction, en fonction de circonstances que l’on va découvrir progressivement.
POUR CLELIA. C’est elle la narratrice. Celle qui donne sa voix, son rythme, son énergie incroyable au texte. Celle qui cherche au-delà des apparences car, tout comme l’autrice Sandrine Cohen, elle est obnubilée par le pourquoi. Evénements traumatiques, secrets de famille, conflits, souvenirs enfouis… cette enquêtrice de personnalité auprès des tribunaux (c’est un vrai métier apparemment !) a la lourde charge de réaliser un travail d’archéologie familiale, le plus souvent en dépit des réticences de la police et des tribunaux, afin d’exhumer ce qui, dans le passé intime des criminels, a pu les conduire à basculer. Narratrice sanguine de ce roman noir et brûlant, elle électrise le texte par sa violence, sa colère absolue, tout en le nourrissant de sa quête éperdue de justice. Sauvage, solaire, profondément intègre et libre, ses fulgurances nous font avancer à marche forcée vers la lumière.
POUR RENDRE JUSTICE. C’est surtout de cela dont il s’agit dans Rosine. Questionner le sens de la justice. Car la culpabilité ne fait aucun doute, Rosine a tué, elle se considère d’ailleurs elle-même comme un monstre. Mais si Rosine est coupable, elle n’est peut-être pas la vraie responsable. Ce roman social, très documenté qui se dévore comme un docu-fiction, devient alors interrogation sur la justice elle-même, sur son fonctionnement et sa raison d’être. Une justice qui est à sa place dès lors qu’elle considère l’individu et la singularité de ses actes.
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