L'ordre du jour
  • Date de parution 18/08/2021
  • Nombre de pages 160
  • Poids de l’article 116 gr
  • ISBN-13 9782330153045
  • Editeur ACTES SUD
  • Format 175 x 110 mm
  • Edition Livre de poche
Ouvrage de référence de l'auteur Récits

L'ordre du jour

3.87 / 5 (3095 notes des lecteurs Babelio)

Résumé éditeur

20 février 1933 : une fin d'après-midi à Berlin, dans les confortables salons du Palais du président du Reichstag. Une réunion secrète entre les plus grands industriels allemands et les hauts dignitaires nazis doit sceller le financement de la prochaine campagne électorale. Il y a là "le nirvana de l'industrie et de la finance" : Krupp, Opel, Siemens, Telefunken... De cette scène inaugurale procède un consentement irréversible qui aboutira au pire. Au fil d'un récit intense et sidérant, l'écriture d'Éric Vuillard rend à l'engrenage des faits leur dérisoire et pathétique charge émotionnelle, la fragilité de l'instant. Et derrière les images triomphales de la Wehrmacht se découvrent, aux origines, de vulgaires marchandages, de tristes combinaisons d'intérêt. Cette démonstration magistrale et grinçante doit nous rappeler que, le plus souvent, ce qui semble irrésistible, ce ne sont pas les circonstances, mais nos accomodements et les compromis des puissants.

livré en 5 jours

livré en 5 jours

  • Date de parution 18/08/2021
  • Nombre de pages 160
  • Poids de l’article 116 gr
  • ISBN-13 9782330153045
  • Editeur ACTES SUD
  • Format 175 x 110 mm
  • Edition Livre de poche

l’avis des lecteurs

Quatrième de couverture


Ils étaient vingt-quatre, près des arbres morts de la rive, vingt-quatre pardessus noirs, marron ou cognac, vingt-quatre paires d'épaules rembourrées de laine, vingt-quatre costumes trois pièces, et le même nombre de pantalons à pinces avec un large ourlet. Les ombres pénétrèrent le grand vestibule du palais du président de l'Assemblée ; mais bientôt, il n'y aura plus d'Assemblée, il n'y aura plus de président, et, dans quelques années, il n'y aura même plus de Parlement, seulement un amas de décombres fumants.



Mon avis


Les plus grandes catastrophes s’annoncent souvent à petits pas


La couverture du livre montre une photo de l’industriel allemand Gustav Krupp von Bohlen und Halbach prise en septembre 1931. Il est l’un des protagonistes de ce court récit qui revisite l'Anschluss c’est-à-dire l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie. Le 20 février 1933, vingt-quatre patrons allemands se réunissent. On découvre leurs échanges, leurs discussions, leurs choix et comment ils trouvent de la main d’œuvre à bon marché. Certains finiront par le payer au prix fort… Le président du Reichstag, Hermann Goering et Hitler viennent leur parler. Il faut être fort, en finir avec ce qui ressemble à un régime faible et donner de l’argent, beaucoup pour accompagner les projets du Führer. La face cachée de l'Anschluss est traitée avec dextérité.


J’ai trouvé ce récit un peu lourd au début (sans doute l’absence de dialogues en style direct n’allège pas le phrasé). Puis le contenu, l’approche que fait l’auteur des événements, des liens entre les hommes m’a intéressée et je suis rentrée totalement dans ma lecture.


Éric Vuillard ne cite pas ses sources, et ce livre est noté « récit »… Est-ce un roman, un essai, il me semble qu’il aurait été intéressant d’en savoir plus….

Où?

Le roman se déroule en Allemagne et en Autriche, notamment à Berlin, Berchtesgaden, Munich, Vienne, Linz. On y évoque aussi des épisodes se déroulant à Paris et Londres ainsi que tous les lieux où sont construits les camps de concentration.

Quand?

L’action se situe de 1933 à nos jours.

Ce que j’en pense

Comment la Seconde guerre mondiale a-t-elle été rendue possible ? Quelles circonstances particulières ont présidé à l’avènement de cette tragédie ? Quels ont été les premiers acteurs de ce drame et qu’en savaient-ils ? Autant de questions auxquelles Éric Vuillard répond dans ce court mais passionnant récit, utilisant pour cela la même approche que dans 14 juillet, c’est-à-dire au niveau des personnes, des acteurs qui se voient soudain confrontés à une situation exceptionnelle, à des choix aux conséquences terribles.

Tout commence par la convocation à Berlin le 20 février 1933 de la fine fleur de l’industrie et de la finesse. À l’invitation de Göring, les grands patrons sont venus au Reichstag écouter Adolf Hitler leur présenter son programme en vue des élections du cinq mars. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ses propositions trouvent une oreille attentive chez ses messieurs «très respectables». L’État fort, l’éradication des syndicats et des marxistes obtiennent leur adhésion. Si bien que, séance tenante, ils rassemblent quelque 3 millions de Reichsmark qui vont assurer la victoire du chancelier à la petite moustache et à la mèche rebelle.

C’est le début d’un engrenage qui va petit à petit réussir à tout broyer sur son passage. Une fois l’économie allemande sous la botte, il fallait s’attaquer aux puissances étrangères. Après les visites de courtoisie et la «politique d’apaisement», les choses sérieuses peuvent commencer. Sans que les chancelleries européennes ne s’en émeuvent outre-mesure, les exactions se font plus violentes, les discours plus haineux et la menace plus précise. Lorsque le 12 février 1938 le chancelier autrichien arrive à Berchtesgaden, il n’est plus question que de lui faire rendre les armes. Face à l’ultimatum, les manœuvres de Kurt von Schuschnigg pour tenter d’adoucir les clauses les plus dures du traité qu’on lui soumet tournent vite au dérisoire. Beethoven ne viendra pas plus à son secours que le Droit international. C’est la tête basse qu’il reprend le chemin de Vienne. Après un timide «oui», il va soumettre la capitulation au Président de la République. Mais Hitler s’impatiente et n’attendra pas l’accord formel de son voisin pour envahit le pays et déclarer l’Anschluss.

Le voyage soi-disant triomphal de Hitler dans son pays natal est l’un des événements les plus cocasses et les plus éclairants de ce livre. Parce que la réalité est à mille lieues de la version officielle qui fait encore trop souvent autorité. « Car ce sont des films que l’on regarde, ce sont des films d’information ou de propagande qui nous présentent cette histoire, ce sont eux qui ont fabriqué notre connaissance intime ; et tout ce que nous pensons est soumis à ce fond de toile homogène. Nous ne pourrons jamais savoir. On ne sait plus qui parle. »

Éric Vuillard réussit par l’entremise de ce court récit une œuvre d’autant plus salutaire qu’elle est portée par une volonté de faire parler les faits plutôt que les idéologies, de scruter les photos et les expressions des visages plutôt que les discours – c’est particulièrement bien réussi avec la rencontre de Daladier et Chamberlain – de retrouver dans les écrits intimes les sentiments que l’on voulait cacher sur le moment. Mais aussi, et c’est là encore une vraie prouesse, de chercher la marque de l’infamie dans ce qui n’est pas dit, pas écrit. En cherchant par exemple dans la brochure de présentation de l’histoire du groupe Thyssen-Krupp quel rôle a pu, par exemple, jouer Gustav Krupp. Vous savez, l’un de ces 24 «messieurs respectables». Si respectable !

Eric Vuillard capte un de ces points de bascule de l’Histoire qui provoquent, scrutés avec le recul, l’effarement. Et pourtant, tout se passe en douceur, si l’on peut dire. "Comme on le voit, rien ici n’a la densité du cauchemar, ni la splendeur de l’effroi. Seulement l’aspect poisseux des combinaisons et de l’imposture". Pas de déchainement donc, mais un enchainement d’événements dont on ne mesure les conséquences vertigineusement macabres qu’a posteriori.

Nous sommes en 1938. Hitler a décidé d’annexer l’Autriche, et rien ne le fera reculer. Rien d’ailleurs ne l’en empêche vraiment. Les pontes de l’Industrie et de la Finance, convoqués par Goering, acceptent sans rechigner de "passer à la caisse" : ces représentants de grands noms qui nous sont aujourd’hui encore familiers (Opel, Siemens, Allianz, Agfa…) sont forcément favorables à la lutte contre le communisme et la suppression des syndicats que leur promet le Führer.

Quant au chancelier autrichien, à qui Hitler impose l’un de ses sbires à la tête de son gouvernement, il capitule après un bref et souffreteux sursaut de révolte qui le tourmente le temps d’une poignée d’heures.

Les pays susceptibles de réagir semblent somnoler : "l’Angleterre se couche et la France fait de beaux rêves". Il est alors pourtant impossible d’ignorer les projets nazis qu’annoncent l’incendie du Reichstag, l’ouverture de Dachau, la stérilisation des malades mentaux, la Nuit des longs couteaux, le recensement des caractéristiques raciales… L’Europe des alliés a-t-elle été prise de cécité volontaire ? En Angleterre, alors que les blindés d’Hitler -pour l’anecdote défaillants- envahissent l’Autriche, ambassadeur d’Allemagne et Premier Ministre britannique jouent à l’occasion d’une soirée mondaine au chat et à la souris. Chamberlain (qui vient d’apprendre l’invasion) fait des courbettes à Ribbentrop tout en désespérant de ne parvenir à se débarrasser de cet invité trop bavard, qui saoule des heures durant ses hôtes de ses prouesses tennistiques pour les empêcher d’agir. Sans doute les prémisses de ce qu’on appelle encore aujourd’hui "la politique d’apaisement"…

Le texte, très court, est porté par une écriture sèche qui exprime une ironie quasi permanente. Eric Vuillard met ainsi en évidence, dans un élan tragi-comique, le paradoxe entre le caractère pitoyable de la plupart des protagonistes du drame -les ramenant à leur humble condition d’individus à coups de détails triviaux- et l’énormité des conséquences de leurs actes, de leur passivité. Car, nous rappelle-t-il, ce sont des hommes, ni plus ni moins, qui tiennent entre leurs mains la marche du monde qui parfois, s’écrit au gré des coups de colère et des manœuvres grossières de fous capricieux et mégalomanes…


AUTRES LIVRES DE Éric Vuillard
DOLPO RECOMMANDE

Livraison soignée

Nos colis sont emballés avec soin pour des livres en excellent état

Conseil de libraires

et des sélections personnalisées pour les lecteurs du monde entier

1 millions de livres

romans, livres pour enfants, essais, BD, mangas, guides de voyages...

Paiement sécurisé

Les paiements sur notre site sont 100% sécurisés