Caleb Traskman Tome 2 Il était deux fois

Gabriel, gendarme en Savoie, recherche sa fille disparue en 2008, il se rend dans l’hôtel où elle a travaillé l’été précédent pour consulter le registre. Il s’endort dans la chambre 29 et se réveille au milieu de la nuit dans la 7, car des étourneaux tombent sur la petite ville avec fracas. Seulement on est en 2020 et Gabriel a complètement oublié ces douze années, passées à rechercher Julie. Il ignore qu’il n’est plus gendarme, ni qu’il s’est brouillé avec son ancien équipier Paul par jalousie amoureuse. Finalement Paul accepte de l’aider et les deux hommes relancent l’enquête qui est classée. Ils agissent clandestinement et feront de bien sombres découvertes parmi des esthètes qui considèrent le crime comme un art.

Je termine la trilogie Caleb Traskman par le milieu, j’ai lu la fin d’abord puis j’ai repris l’histoire dès le début. Si je me souviens bien, le dernier volet commence par un étrange retournement de situation après ce tome 2. Je n’avais pas compris la fin du premier tome, qui est révélée dans celui-ci. Cette série est la première de Thilliez que je lis, mais certainement pas la dernière. On retrouve dans ce roman le thème des troubles de la mémoire, qui marque cette trilogie et d’autres romans. J’ai beaucoup aimé le regard noir et critique qu’il porte sur le dérives de notre société. Il y a des artistes dégénérés pour qui le crime est un art dont on doit rechercher la perfection et qui y sont parvenus dans le roman grâce à une organisation sans faille. Si leurs crimes doivent rester cachés jusqu’à la révélation finale, le public apprécie le résultat comme on le voit. Les arts transgressifs ont un public et l’auteur nous interroge sur ce goût du macabre. Il interroge aussi ses lecteurs sur leur plaisir à lire des récits de crimes divers et variés, et à voir le nombre de livres publiés chaque mois, la littérature policière à encore de beaux jours devant elle. Il fait aussi un clin d’oeil à Bernard Minier (ce qui me rappelle que je n’ai lu que son premier livre!). Si on n’avait pas au fond de nous le goût du sang, on ne lirait pas ces romans.

J’ai apprécié l’évolution de la relation entre Paul et Gabriel, malgré le mal subi, Paul acceptera de reprendre l’enquête et de se mouiller jusqu’au cou, quitte à se faire mettre au placard, c’est une belle définition de l’amitié. Il n’y a pas de super héros dans ce roman, mais des personnages blessés qui font face comme ils peuvent, qui prennent des risques et les assument, des humains avec des ressources et des failles, confrontés à la noirceur de leurs semblables. On ne peut qu’être touchés par ces personnages profonds, à la psychologie bien développée.

Le style est très addictif, avec de nombreux rebondissements. On est tout de suite happé par le suspense et on ne peut lâcher ce roman très bien construit. Il y a de nombreux jeux de mots et des palindromes, un des thèmes récurrents du livre. J’ai beaucoup aimé la magnifique langue de l’auteur. La lecture en audio est encore plus plaisante, je trouve que c’est le support idéal pour les pavés. J’ai lu la trilogie dans le désordre, mais c’est mieux de ne pas le faire pour profiter au maximum de la tension dramatique de cette belle série bien noire.

En 2008, Julie, dix-sept ans, disparaît en ne laissant comme trace que son vélo posé contre un arbre. Le drame agite Sagas, petite ville au cœur des montagnes, et percute de plein fouet le père de la jeune fille, le lieutenant de gendarmerie Gabriel Moscato. Ce dernier se lance alors dans une enquête aussi désespérée qu’effrénée. Jusqu’à ce jour où ses pas le mènent à l’hôtel de la Falaise… Là, le propriétaire lui donne accès à son registre et lui propose de le consulter dans la chambre 29, au deuxième étage. Mais exténué par un mois de vaines recherches, il finit par s’endormir avant d’être brusquement réveillé en pleine nuit par des impacts sourds contre sa fenêtre… Dehors, il pleut des oiseaux morts. Et cette scène a d’autant moins de sens que Gabriel se trouve à présent au rez-de-chaussée, dans la chambre 7. Désorienté, il se rend à la réception où il apprend qu’on est en réalité en 2020 et que ça fait plus de douze ans que sa fille a disparu.

2008: Gabriel Moscato, brigadier à la gendarmerie de Sagas, écume les hôtels, les restaurants, les parkings, à la recherche de sa fille Julie, disparue. Il s’endort à l’hôtel de la Falaise, cherchant inlassablement dans les registres un nom, une trace lui permettant d’avancer dans son enquête. Il se réveille le lendemain matin en ….2020. Douze ans se sont écoulés! Gabriel ne se reconnaît pas dans le reflet du miroir. Il a même changé de nom! Que s’est-il passé durant cette nuit? Julie est toujours portée disparue. Dans le même temps, dans la forêt de Sagas, un corps de femme est retrouvé atrocement mutilé. Paul Martini, chef de la gendarmerie, enquête sur le meurtre. Son chemin va croiser celui de Gabriel…

Il était deux fois est un thriller efficace qui reprend tous les codes du genre. Ce n’est pas une suite au Manuscrit inachevé mais l’auteur truffe son roman de références à cet ouvrage. Je conseille donc de le lire afin de ne perdre aucun indice. En effet, le lecteur va vite croiser la route d’un certain Caleb Traskman…

Il était deux fois est mené d’une main de maître. Il y a d’abord cet écart de temps inexplicable qui frappe Gabriel Moscato de plein fouet. Douze ans semblent s’être écoulés en une seule nuit. Que s’est-il passé? Hallucination? Perte de mémoire? Saut dans le temps? Franck Thilliez brouille les pistes dès le départ. Il y a ensuite cette double enquête qui va mener Paul et Gabriel à faire alliance: Julie n’a toujours pas été retrouvée et qui est cette mystérieuse inconnue assassinée dans la forêt? Là encore, l’auteur dose savamment son suspens pour mener le lecteur par le bout du nez.

J’ai élaboré une quantité d’hypothèses, toutes fausses bien évidemment. Quand en plus, Franck Thilliez s’amuse avec les mises en abyme, il mène son lecteur en bateau d’un bout à l’autre. Je reconnais encore une fois son audace. Les histoires s’emboîtent telles des poupées russes.

Cependant il m’a manqué un petit quelque chose pour que ce thriller soit un coup de cœur. L’intrigue reste au final très classique et j’ai préféré Le Manuscrit inachevé justement pour son grain de folie qui m’a fait perdre les pédales. Certaines interrogations restent encore en suspens, une fois le livre refermé laissant un sentiment d’inachevé justement!

« Il était deux fois » est un excellent roman qui saura vous tenir en haleine jusqu’au bout. Une fois de plus, Franck Thilliez maîtrise à la perfection son suspens, campant des personnages torturés sur des chemins bien sombres.