Le Sens du placement. Ségrégation résidentielle et ségrégation scolaire
Résumé éditeur
Il ne semble faire de doute pour personne, aujourd'hui, que le modèle français d'intégration traverse une crise profonde et durable. Sous l'effet de politiques de " démocratisation " qui, en quelques décennies, ont produit une augmentation sans précédent des effectifs scolaires, l'attention se focalise plus spécifiquement sur les dysfonctionnements de l'école républicaine, censée constituer un lieu privilégié de l'interaction entre divers milieux sociaux. Cette mixité scolaire est désormais perçue comme de moins en moins réalisée, et la pression du chômage a de toute évidence rendu les familles de plus en plus anxieuses pour l'avenir de leurs enfants. Avec la multiplication des palmarès d'établissement depuis les années 1980, il semble donc primordial de savoir, et pouvoir, placer son enfant dans une " bonne école ". Mais ce placement scolaire ne se limite pas à choisir un lieu de scolarisation : choisir une bonne place, c'est aussi choisir un avenir professionnel et social, et donc investir sur l'avenir, effectuer un véritable placement en termes de capital scolaire, dont l'accumulation est plus rentable dans certains lieux, et dans certaines filières, que dans d'autres. Les effets de ces logiques sur le fonctionnement du système éducatif sont aisément décryptables. Si, d'un point de vue individuel, les pratiques de placement scolaire visent à chercher " ce qu'il y a de mieux " pour chaque famille, elles aboutissent d'un point de vue global à la concentration des difficultés dans les établissements les plus défavorisés, qui tendent à être évités par les ménages qui ont les moyens pour placer leurs enfants ailleurs. Depuis quelques années, les inégalités scolaires ont ainsi été ramenées à la ségrégation qui affecte les établissements des quartiers populaires. Au premier rang des facteurs incriminés : la carte scolaire, dispositif administratif censé attribuer aux élèves un établissement public selon le lieu où ils habitent (leur établissement de secteur). Cette logique de sectorisation aurait pour principal défaut de répercuter automatiquement les inégalités résidentielles sur les inégalités scolaires, compromettant la mission d'intégration historiquement attribuée en France à l'école républicaine et le principe d'égalité de tous devant l'éducation. Sa suppression programmée à partir de la rentrée 2008 est le produit d'une lente remise en cause, qui s'est peu à peu imposée dans le " débat public ". Par le biais d'enquêtes approfondies menées en région parisienne au cours des années 2000, ce livre analyse les effets réels de la carte scolaire, et les logiques ségrégatives à l'ouvre, que la carte scolaire avait pour objectif de contrecarrer. Il montre en particulier que la suppression de la carte scolaire apporte une mauvaise solution au problème de la ségrégation scolaire : les élèves défavorisés resteront exclus des écoles favorisées par les mécanismes les plus simples de la concurrence économique et culturelle - distances à parcourir, stigmatisation du lieu de résidence et accès inégal à l'information. Inversement, les élèves favorisés, qui sont les moins gênés actuellement par la carte scolaire, auront encore plus de facilités pour se retrouver dans les mêmes lieux, notamment dans les quartiers centraux en phase d'embourgeoisement récemment investis par les classes moyennes. La dérégulation favorisée par la politique actuelle ne peut donc qu'entériner la dualisation en marche du système d'enseignement. Franck Poupeau est sociologue et Jean-Christophe François géographe.
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