Un long voyage
  • Date de parution 06/04/2022
  • Nombre de pages 320
  • Poids de l’article 176 gr
  • ISBN-13 9782253106890
  • Editeur LGF
  • Format 182 x 110 mm
  • Edition Livre de poche
Fantasy Francophone Ouvrage de référence de l'auteur

Un long voyage

3.91 / 5 (636 notes des lecteurs Babelio)

Résumé éditeur

Issu d'une famille de pêcheurs, Liesse doit quitter son village natal à la mort de son père. Fruste mais malin, il parvient à faire son chemin dans le comptoir commercial où il a été placé. Au point d'être choisi comme secrétaire par Malvine Zélina de Félarasie, une jeune femme de prestigieuse ascendance, promise à un grand avenir politique. Dans son sillage, Liesse va s'embarquer pour un ambitieux voyage loin de ses îles et devenir, au fil des ans, le témoin privilégié de la fin d'un empire.Un émouvant récit de vies bouillonnantes refusant de se résoudre à un seul destin.Un univers complet qui fourmille de paysages grandioses et de personnages attachants. Embarquez sans attendre ! Causette.Un roman d’exception calibré à la perfection. Un grand plaisir de lecture. Librairie Actes Sud (Arles).PRIX HORS CONCOURS 2020 | PRIX LIBR’À NOUS IMAGINAIRE 2021 | PRIX ELBAKIN.NET DU MEILLEUR ROMAN FRANCOPHONE DE FANTASY 2020

livré en 5 jours

livré en 5 jours

  • Date de parution 06/04/2022
  • Nombre de pages 320
  • Poids de l’article 176 gr
  • ISBN-13 9782253106890
  • Editeur LGF
  • Format 182 x 110 mm
  • Edition Livre de poche

l’avis des lecteurs

Lettre D du ABC Challenge de l’imaginaire : ma douzième lecture du challenge. Un long voyage de Claire Duvivier a passionné les foules il y a quelques temps. Ce roman sorti en 2020 aux Forges de Vulcain a raflé plusieurs prix mais a aussi divisé les lecteurs. J’avais envie de laisser retomber le soufflé pour me plonger dans ce récit, sans ce bourdonnement permanent à mes oreilles. En quelque sorte, l’aborder l’esprit quasiment vierge. J’ai fort bien fait, car j’ai pu apprécier pleinement ma lecture, que j’ai d’ailleurs beaucoup aimée.

Un jeu narratif efficace

Nous suivons un récit délivré par Liesse, le personnage principal, à son narrataire. Liesse écrit plus tard, et raconte, à la demande du narrataire, l’histoire de Malvine Zélina de Félarasie, jeune aristocrate ambassadrice dans l’Archipel, envoyée là par l’Empire. J’ai bien aimé le fait qu’on ne sache pas pendant une bonne partie du roman qui est Gémétous, le narrataire. Ca crée de l’attente et de la surprise tout au long du récit. Sa révélation tout autant, et cela donne beaucoup de sens au récit dans son ensemble.

Liesse concentre tous les rôles du narrateur : il raconte son récit en l’organisant de manière généralement linéaire, mais n’exclut pas quelques prolepses pour étirer le récit et lui donner du relief. Liesse commente et juge son récit et son propre personnage, avec son regard futur. Mais il joue aussi le rôle du narrataire en imaginant ses réponses, son impatience, et devance ses éventuelles remarques. Se crée alors un dynamisme dans la narration qui m’a beaucoup plu. Je me suis identifiée à ce narrataire que j’ai imaginé impatient de savoir quand allait commencer ce voyage.

Une narration mise en scène

Car ce voyage, il met du temps à arriver ! J’en étais à 28% du roman quand Liesse a fait ses bagages pour partir. Et j’ai trouvé ça génial, parce que le narrateur a retardé pendant tout ce temps le vrai récit, faisant attendre son narrataire… et le lecteur. Et il s’en amuse bien, d’ailleurs ! La plume de Claire Duvivier semble aussi douce et posée qu’un fleuve millénaire qui prend son temps pour faire son chemin. Mais ne vous y trompez pas : vous serez malgré tout emmenés par le courant, lentement mais sûrement. C’est faussement peinard, en fait. C’est parfois assez contemplatif, mais Claire Duvivier a su capter toute mon attention, et m’hypnotiser. J’ai commencé ce roman tranquillement. Et puis pouf, je me suis retrouvée plusieurs dizaines de pages plus loin, complètement embarquée dans ce voyage, sans avoir capté ce qu’il s’était passé entre temps.

D’autre part, il y a quelque chose de très théâtral dans cette narration. Liesse maintient le suspense sur le récit avec beaucoup d’humour, et retarde le moment où il va parler de Malvine. Il y a une mise en scène du récit que j’ai bien aimée. Liesse est comme un acteur qui déclame son rôle sur scène.

« Gémétous, tu vas encore penser que je parle trop de moi et pas assez de Malvine et de Merle, et que je ne fais qu’effleurer ces sujets chaque fois que je les aborde […]. Cette histoire est une histoire insulaire. A ce titre, elle obéit à une structure comparable à celle de nos chants, ou plutôt de nos pièces de théâtre […]. Tu dois savoir, ma hiératique, que ces spectacles, dans les peuplements, se déroulent toujours en deux fois : d’abord, les acteurs principaux déclament l’histoire, qu’il s’agisse d’une fable, d’un récit historique ou d’une romance. C’est la partie principale du spectacle. « 

Une illusion totale

Ce que j’ai trouvé très fort, c’est qu’en fait, Liesse dit raconter la vie de Malvine, mais c’est la sienne qu’il rapporte. Alors certes, par ses yeux et son récit, on est témoin de moments qu’il a vécus auprès de Malvine, mais finalement, celle-ci n’a qu’un petit rôle de figurante. On ne la voit pas beaucoup, Malvine. Et puis bon, elle n’est pas si époustouflante que ça non plus, d’autant que l’autrice s’amuse avec ce personnage. Elle nous rappelle, à sa manière, que les personnages ne sont que des êtres de papier.

Claire Duvivier nous entube complètement dans ce roman : j’aime beaucoup les trompe-l’œil littéraires, je suis très bon public pour ça, et j’ai complètement adhéré. J’aime énormément les auteurs qui s’amusent avec les codes du genre.

Un roman sur les limites du genre

Entre réel…

Un long voyage m’a pas mal questionnée sur l’endroit où j’allais le ranger. Littérature imaginaire, blanche, ou entre les deux ? Heureusement que je l’ai créée cette catégorie tiens, fort pratique. Car là encore, Claire Duvivier s’amuse avec les limites du genre.

On a majoritairement un récit très ancré dans le réel. Certes, l’univers est fictif, mais il est une transposition du réel. Ce sont tous les rouages d’un Empire qui sont décrits ici : diplomatie, commerce, logistique, administration… Les thématiques évoquées au cours du voyage de Liesse sont très réalistes. En effet, on imagine sans peine que l’Empire décrit pourrait être n’importe lequel ayant existé. Un long voyage raconte la fin d’un Empire, mais finalement, il y a là aussi une illusion créée par la distance entre cette civilisation qui prend fin et ses répercussions. Car tout est vécu du point de vue de Liesse, et sur l’impact de cette chute sur sa propre vie. On n’est pas dans l’Histoire, mais dans l’histoire personnelle.

Certaines scènes sont également très visuelles, notamment les scènes d’affrontement, qui là encore m’ont vraiment fait penser à du théâtre tant elles étaient vivantes. Liesse raconte aussi la famine, l’errance, la difficulté d’être parent, le sentiment d’être déraciné et de n’appartenir à aucune terre, la condition d’esclave… Autant de moments vibrants et que j’ai trouvés forts en émotions. J’ai également beaucoup aimé toute la question de la langue, primordiale ici.

Mais par moments aussi, ce roman revêt des allures de conte, comme une sorte de « il était une fois jadis », le récit d’une époque révolue, peuplée de personnages merveilleux, sorte de héros mythifiés dont la postérité se souviendra…

et surnaturel

Et voilà que pouf, en plein milieu de ce récit, en pleine action très réaliste, où il se passe pas mal de choses… la magie survient, au détour d’un témoignage livré par Malvine à Liesse, alors que la mort est là, juste là. Certains pourraient trouver ça carrément invraisemblable, moi aussi, mais j’ai surtout trouvé fort ça fort marrant (Je ne suis pas sûre non plus que ce soit ce que l’autrice ait voulu mais bon).

Bref : magie, pouf ! Comme un lapin sorti de son chapeau. Claire Duvivier nous refait un petit tour de prestidigitation, en nous parlant pendant quelques pages d’un univers surnaturel par la voix de Malvine, au détour d’un chapitre. Et cette incursion surnaturelle apporte du mystère, car bien sûr on n’en saura pas vraiment beaucoup plus non plus. Elle met ça là, et puis le lecteur n’a qu’à se débrouiller avec. Une énigme de plus à résoudre. Finalement, l’autrice aura planqué pas mal d’énigmes dans son roman. Elle doit être redoutable lors des chasses aux œufs. Le genre à trouver des cachettes improbables.

Du coup, j’ai classé ce roman dans « littérature entre les deux » : entre réel et surnaturel, car je n’y vois pas de la fantasy pure. J’y vois plutôt un jeu littéraire, un joli trompel’œil créé, un roman qui s’amuse avec les codes du genre, entre roman et théâtre, entre réel et surnaturel, entre Histoire et histoire…. Un voyage qui n’en est pas vraiment un, un récit d’un personnage qui n’est pas le sien… Je me suis fait balader pendant tout le roman, et franchement… j’ai vraiment aimé ça.

Un long voyage de Claire Duvivier m’a beaucoup plu par son originalité. J’ai beaucoup aimé ce voyage qui n’en était pas vraiment un, je me suis laissée porter par la plume de l’autrice qui m’a complètement hypnotisée et embarquée sans broncher dans cette histoire. Je me suis beaucoup amusée, en fait, à comprendre les énigmes posées par l’autrice, à les résoudre (ou pas), et à me laisser berner sur toute la ligne. J’ai trouvé ça franchement très très fort, très bien mené, et ça a parfaitement fonctionné avec moi. J’ai passé un très bon moment de lecture, fort agréable, tout en étant sur le fil, dans cet entre-deux, l’illusion et le trompe l’œil très réussis.

On parle beaucoup en ce moment de la dernière publication des éditions Aux forges de Vulcain, Un long voyage de Claire Duvivier. Il s’agit du premier roman de l’autrice qui n’est pas une inconnue dans le milieu des littératures de l’imaginaire puisqu’elle est également éditrice. Claire Duvivier a en effet fondé avec Estelle Durand les éditions Asphalte en 2010.

Le récit d’une vie

Le roman est l’histoire de Liesse, personnage principal et narrateur du roman. Au crépuscule de sa vie, Liesse choisit de raconter ce qu’a été sa vie à une dénommée Gémétous. Il faudra attendre la fin de ses mémoires pour comprendre qui est cette fameuse Gémétous à qui il s’adresse à plusieurs reprises. À travers le récit de Liesse, apparait une autre histoire en filigrane : celle de Malvine Zélina de Félarasie, personnage important de l’empire Quaïmite. En narrant sa vie, Liesse met l’accent sur son illustre entourage, car Liesse n’est pas quelqu’un de dominant au sein de l’empire. Liesse est un fils de pécheur, son père est mort tragiquement en mer. Il vivait alors sur l’île de Tan-henua au sein de l’Archipel. Le décès de son père et les coutumes locales vont faire qu’il va se retrouver à vivre parmi les membres de la légation impériale se trouvant sur l’Archipel. En effet, Liesse est acheté par un fonctionnaire impérial voulant le sauver ainsi d’une mort certaine. Ceci fait de lui un esclave alors que l’Empire ne pratique plus l’esclavage. En étant recueilli par l’Empire, Liesse reçoit une bonne éducation mais se retrouve aussi tiraillé entre deux mondes, deux cultures.

Malvine Zélina de Félarasie est une jeune noble dont le premier poste en tant que régisseuse impériale l’amène sur l’Archipel où grandit Liesse. Malvine apporte beaucoup de changement avec elle et l’Archipel devient une région florissante. Liesse va connaitre Malvine en tant que secrétaire particulier et prendre conscience de la valeur de la jeune femme. C’est le début d’une relation de travail puis d’une amitié qui les mènera tous deux vers un long voyage, tout d’abord vers la cité-état de Solméri puis vers leur destin. Liesse est un personnage simple, il n’a pas de grandes qualités en tant que combattant ou voleur. Il raconte ainsi son histoire de manière vraie et humaine, la rendant ainsi touchante.

Un récit à tiroirs

Derrière l’histoire de Liesse apparaissent plusieurs autres récits : celui de Malvine mais également le destin de l’Empire dans lequel ils vécurent. Claire Duvivier nous conte ainsi l’Histoire derrière les histoires. La particularité du roman est que l’histoire de l’Empire nous est racontée en toile de fond et au travers du regard d’un homme simple qui n’a pas une position importante au sein de cet Empire. On appréciera d’ailleurs l’inversion des rôles dans ce monde où une femme occupe le poste d’officier et de commandant et où un homme est à son service en tant que secrétaire. Grace au récit de Liesse, le lecteur apprend à connaitre le monde dans lequel se déroule le roman, un monde où les femmes peuvent avoir des postes de premier ordre sans que cela ne pose le moindre problème, un monde où on ne rencontre pas de créatures surnaturelles, un monde qui semble par certains côtés être un lointain écho du notre.

C’est aussi un récit à tiroir car Liesse va être amené à laisser la parole à Malvine pour parler d’un événement de premier ordre dans l’Histoire. Avant de prendre ses fonctions à Solméri, Malvine va disparaître pendant de longs mois, événement qui aura des conséquences très importantes par la suite. Liesse sera le témoin involontaire de ces événements et par la suite de la fin de l’Empire. Le roman parle de l’Histoire à travers les récits de Liesse, puis plus tard de Malvine, l’Histoire d’un Empire, d’une ville. Dans leurs récits, Liesse et Mavine nous proposent leur vérité sur ces faits, la vérité de ceux qui les ont vécu de l’intérieur. Pourtant, ça ne sera pas celle que l’Histoire officielle gardera. Le témoignage de Liesse permet de comprendre ce qu’il s’est passé et de voir les faits par les yeux des gens simples. Il offre un récit humain, le récit d’une vie. Le roman parle de la transmission, de l’importance des souvenirs. Ce n’est clairement pas un roman d’action, mais un texte où il faut se laisser porter par l’histoire et dont le rythme est assez surprenant, lent au début et basculant soudainement au milieu du roman. Les premières pages pourront sembler longues à certains, la mise en place mettant un peu de temps. Le récit de Malvine parait un peu court également.

Un long voyage est ainsi un roman surprenant, un récit à tiroirs où un homme ordinaire est le témoin d’événements extraordinaires. Claire Duvivier évoque avec beaucoup de sensibilité l’Histoire au travers du regard d’un homme dont le destin va basculer. Une bien belle réussite.


Je porte les forges de Vulcain dans mon cœur, ce n’est pas nouveau. La confiance que je porte à leur qualité éditoriale me permet de ne pas avoir à trop réfléchir lorsque certaines de leurs sorties semblent faire l’unanimité. Et clairement, Un Long Voyage, même plusieurs semaines avant sa sortie, mettait tout le monde d’accord chez les priviliegié·e·s qui avaient pu poser leurs yeux dessus. Autant dire que je l’attendais de pied ferme, même si je n’ai pas mis la main dessus aussi vite que je l’aurais souhaité. Ce qui m’a amené à croiser d’autres avis, moins dithyrambiques, ramenant mon niveau de hype à des seuils plus raisonnables. Alors, hype méritée ? Chef d’oeuvre d’appellation contrôlée ou phénomène de mode ? Comme toujours, c’est bien plus compliqué que ça, et je m’en vais tenter de vous expliquer pourquoi je me place plutôt dans un entre-deux circonspect.

Liesse se décide enfin à raconter à son amie Gémétous, par le biais d’une longue lettre, la vérité sur sa vie ; et surtout sur une personne dont il est l’un des derniers en vie à pouvoir se vanter de l’avoir connue, Malvine Zélina de Félarasie. Pour cela, il décide de contextualiser leur rencontre et leurs péripéties communes. Il débute donc ce récit par celui de sa propre vie, issu d’une tribu de pêcheurs, perdus non loin d’une archipel appartenant à l’empire, où il fera une partie de sa vie, en compagnie de gens aux profils divers, jusqu’à la rencontre qui l’amènera bien loin de son foyer.

Je trouve excessivement compliqué de décider par où commencer pour relater ma relation avec ce roman si particulier, tant il est à la fois, à mes yeux, remplis de qualités et de défauts nourrissant mes réflexions. L’idéal est sans doute de suivre le fil que j’ai moi-même suivi à sa lecture, et de commencer par ce qui m’a gêné. Le format épistolaire, pour commencer, dont je trouve qu’il est indubitablement un des plus compliqués à maîtriser lorsqu’il s’agit de raconter une histoire ; devant osciller entre la subjectivité du narrateur, ses familiarités et une nécessaire oralité, afin d’apporter un semblant de souffle à l’ensemble, mais sans perdre en lisibilité ni en élégance. De ce point de vue là, il me faut être assez abrupt, je n’ai pas été convaincu du tout. La faute sans doute à un récit trop structuré à mon goût, notamment via le chapitrage, manquant cruellement de naturel, pas aidé non plus par les adresses rigides à la destinatrice du courrier, et aux multiples références à divers événements sous formes de semi-prolepses que j’ai malheureusement trouvées maladroites plus souvent qu’à leur tour. Paradoxalement, en s’inscrivant dans le registre épistolaire, bien que ce dernier fasse sens à l’échelle du récit tout entier, Claire Duvivier se force trop souvent à insister sur cet aspect de son récit pour ne pas qu’on l’oublie au milieu d’une narration par ailleurs très littéraire ; et lui fait perdre en naturel, et donc en souffle.

À cet égard, il faut bien dire que le premier tiers a été particulièrement difficile à traverser. Il est fort possible qu’un certain niveau de fatigue de ma part soit à blâmer, notamment en terme de mémorisation des – nombreux – personnages, pas tous importants, comme d’un certain nombre de données géographiques et géo-politiques un peu trop pragmatiques, à l’intérêt discutable. Beaucoup d’enjeux à surveiller, sans jamais vraiment savoir lesquels auront leur importance pour la suite du récit. Et de fait, bon nombre n’en n’ont pas eu, ce qui a pu me frustrer arrivé à la moitié du roman, lorsqu’une bonne partie de ces enjeux se révèlent mineurs voire insignifiants pour la suite, et n’apportent pas tant de choses que ça au contexte général. Encore une fois, on retrouve dans une situation curieuse vis-à-vis du format épistolaire. Il est logique et naturel que Liesse s’égare parfois, nous en raconte trop ou pas assez, puisque son histoire le concerne au premier chef, et donc sa façon de la raconter, surtout au vu de ses motivations. Mais pour autant, on ne sait pas toujours sur quel pied danser, à quoi prêter l’attention nécessaire afin de comprendre pleinement l’entièreté des enjeux, ce qui n’aide pas à la concentration. Encore une fois, je ne saurais dire s’il me faut blâmer mon état de relative fatigue au moment de la lecture (probablement), mais j’ai parfois dû me reprendre à lire un paragraphe ou une page entière, mon esprit étant parti vagabonder au milieu d’une phrase.

Mais – et c’est un grand mais – ne vous laissez pas leurrer par ces réserves, qui, si elles prennent de la place à exprimer, n’en prennent pas autant à ressentir. En dehors de ces griefs somme toute très personnels, il reste que ce premier roman est rempli de qualités autrement plus convaincantes qui ont d’abord su me donner envie de continuer malgré ses premières difficultés ; mais surtout, m’ont fait profiter pleinement de sa seconde moitié, en particulier de sa conclusion.

Au premier rang desquelles il faut compter ce que j’appellerais des petits moments de grâce. Car si ce récit a pu me paraître scolaire, par moments, dans sa narration, il a régulièrement su saisir des instants criants de vérité qui m’ont réellement touché, qui sont nettement plus compliqués à expliquer. Un Long Voyage, ponctuellement, se départ de ses atours un peu trop techniques pour se délier, gagner en souffle, en humanité, et taper incroyablement juste. Je ne saurais pas mieux l’expliquer. Ce sont ces moments qui ont d’abord su me faire tenir malgré mes doutes, puis avancer avec un réel plaisir.

Ensuite, bien qu’il ait à mon avis un peu tardé à venir, l’aspect fantasy (EDIT : comprendre « magique »/extraordinaire) du récit est très réussi, habile, bien qu’un peu trop en retrait par rapport aux enjeux les plus importants du récit, devenant visible et influençant le récit un peu trop tard à mon goût. Je regretterais peut-être que ces artifices de genre ne bénéficient pas d’un peu de préparation en amont, par des allusions à des possibilités similaires à celle présentée comme pivot du récit, surgissant un peu de nulle part. Elle gagne en effet de surprise ce qu’elle perd en vraisemblance à l’aune du reste du roman. Et si j’étais au courant de l’aspect fantasy d’Un Long Voyage avant de l’ouvrir, je ne pourrais pas nécessairement en jurer de tou·te·s ses futur·e·s lecteurices, tout comme de leur tolérance à une telle irruption dans un récit jusque là relativement classique. J’ai accepté de donner un joker à Claire Duvivier car cela faisait sens à l’aune du récit et lui conférait une très belle profondeur, mais je ne saurais en jurer pour tout le monde.

Tout le souci d’un récit comme celui-ci est qu’il est plus aisé d’en faire une critique qui semblera négative, puisque tout le temps pris à en décortiquer ce que je considère comme des défauts aura plus de poids que les simples ressentis positifs, dont il me sera beaucoup plus difficile de faire le détail. Sans compter que je ne l’ai sans doute pas lu dans les meilleures conditions. Que retenir alors ? Un premier roman, souffrant logiquement de défauts d’un premier roman : un style qui se cherche encore un peu, des soucis de cohérence à quelques niveaux…

Mais un bon premier roman. Et c’est là dessus que je préférerais insister. Parce que malgré tout, jamais je n’ai soupiré, levé les yeux au ciel ou réfléchi à l’idée de laisser tomber. Il y avait trop d’éléments intéressants, curieux ou touchants pour que jamais ne me vienne l’idée d’arrêter. Fondamentalement, rien n’est mauvais dans ce roman, il a, comme souvent plus pêché par une absence relative et ponctuelle de réelles qualités qui l’auraient fait sortir du lot pour pleinement me convaincre. Mais lorsqu’il était sur sa lancée, notamment dans son dernier tiers, confondant d’humanité, j’étais totalement conquis. Donc, plutôt qu’y voir une expérience ratée ou quelque chose de négatif dans ce goût-là ; même si je ne suis pas le plus convaincant du monde – j’en conviens – je préfère largement y voir les promesses enthousiasmantes d’une autrice prenant ses marques, posant là les premières pierres de l’édifice d’une carrière que je lui souhaite remplie de succès, et dont je ne doute pas un seul instant.


Depuis le début du confinement, il y avait un livre qui me faisait de l’œil mais que je ne m'étais pas encore décidée à acheter. Je me disais, de la fantasy atypique, moi en qui lit de moins en moins, est ce que je vais accroché ? Vais-je arriver à rentrer dans l'histoire ? Un long dilemme, étant tombée amoureuse de la couverture lorsque les éditions Aux forges de vulcain l'avait présenté et voyant les avis positifs se multiplier, j'ai fini par craqué sur la version numérique... Dans cette chronique, nous allons donc parler de ce qui sera, je pense, l'un de mes plus gros coup de cœur Fantasy de l'année : Un long voyage de Claire Duvivier.

Issu d'une famille de pêcheurs, Liesse doit quitter son village natal à la mort de son père. Fruste mais malin, il parvient à faire son chemin dans le comptoir commercial où il a été placé. Au point d'être pris comme secrétaire par Malvine Zélina de Félarasie, ambassadrice impériale dans l'Archipel, aristocrate promise aux plus grandes destinées politiques.

Dans le sillage de la jeune femme, Liesse va s'embarquer pour un grand voyage loin de ses îles et devenir, au fil des ans, le témoin privilégié de la fin d'un Empire.

Ce livre écrit à la première personne du singulier comme les mémoires d'un homme qui, à un âge avancé, décide sous la pulsion d'un proche, de témoigner de sa vie et à travers celle-ci de la vie d'une figure de son époque. Notre conteur est Liesse, celle dont il va conter la vie à travers la sienne est Malvine Zélina de Félarasie. Liesse est né dans l'Archipel, bien loin du cœur de l'Empire, dans un famille de pêcheur. A la mort de son père, sa mère ne pouvant subvenir aux besoins de tous ses enfants décide de le laisser aux bons soins du comptoir commercial de l'Empire dans l'Archipel. C'est ainsi que Liesse va grandir parmi les hommes et les femmes de l'Empire venus travailler pour quelques années dans ce comptoir lointain et qu'il fera la connaissance de Malvine Zélina de Félarasie. Jeune femme intelligente et de haute naissance, puisqu'elle fait partie d'une des quatre familles impériales, Malvine bouleversera la vie de Liesse et l'emmènera bien loin de ses iles pour un long voyage dans un Empire qui vit ses dernières années.

Gémétous, ma hiératique, c'est pour toi que j'allume cette lanterne, que je sors ces feuilles, que je trempe cette plume dans l'encre. A vrai dire, je melance dans cette entreprise sans savoir si je pourrai la mener à bien : il y a fort longtemps que je n'ai pas couché des mots sur le papier et, même à l'époque où cette tache m'était quotidienne, mes œuvres se limitaient à des rapports et procès-verbaux. Mais parès tout ce n'est pas une épopée que tu m'as demandée ; toi, tu veux la vérité sur Malvine Zélina de Félarasie, et je suis l'un des derniers en vie à l'avoir connue. Je vais donc faire la lumière sur elle...

 

Claire Duvivier signe avec Un long voyage un premier roman d'une qualité incontestable, et telle une conteuse née, nous entraine aux cotés de Liesse dans un Empire aux frontières et au passé flou mais dans lequel j'ai évolué avec curiosité. Happées des les premières pages de ce récit, j'ai eu bien du mal à le lâcher avant la fin. Avec une plume hypnotique, Claire Duvivier écrit le témoignage absolument bouleversant d'un homme et en fait, en quelques sorte, le témoin de sa génération. Un homme pauvre, issu d'une contrée lointaine qui, un peu par hasard, s'attachera à l'une des figures de son époque et qui témoignera pour donner sa vision d'évènements historiques. Que dire à part que ce récit est tout simplement brillant ? Ici, comme l'indique le titre du livre, c'est le voyage littéraire qui est important, la destination n'est au final qu'un détail. 

 

Un long voyage est une fantasy sans ostentation, intimiste, qui nous happe dans les contrées de l'Empire et nous dessine une fenêtre sur les dernières décennies d'un royaume sans empereur. Je reste impressionnée du rythme que l'autrice a réussi à donner à son récit sans pour autant nous conter une histoire qui se déroulerait à cent à l'heure. C'est une belle plume que je découvre avec ce très beau texte où le dépaysement est totale avec un univers fort bien construit mais, qu'au final, on ne fait qu'effleurer car là n'est pas le centre de l'histoire.

"Surtout , en arrivant à Solmeri, ne fais pas le caneton." Et comme je l'interrogeai du regard, ellem'expliqua :" Ne t'attache pas bêtement à la première personne que tu vas voir en descendant du bateau." Puis, après une dernière caresse sur le crane de son chien, elle ramassa son sac, tourna les talons et s'éloigna, fendant la foule massée à la sortie des douanes. J'étais à mille lieues de me douter à ce moment-là que je ne la reverrais pas avant des mois - ni elle qu'elle ne me reverrait pas avant plus longtemps encore.

 

Est-ce clair que j'ai adoré ce roman ? Et je n'ai même pas trouvé de points négatifs c'est dire... Je ne peux que vous conseiller très très fortement cette lecture, encore une fois, il y a de bonnes chances que ce soit une de vos meilleures lectures de l'année, et la découverte d'une autrice à suivre !

 

J’ai beaucoup aimé ce voyage fantasy, qui commence doucement ; très longtemps je me suis demandé pourquoi ce roman était étiqueté Fantatasy et SF, et ça m’allait très bien. La première partie du livre est tout ce qu’il y a de classique et rien n’indique qu’on n’est pas dans le monde réel, si n’est les noms des contrées qu’on ne reconnaît pas.

Le jeune Liesse, sept ans est emmené au comptoir de l’Empire par sa mère. Dans cet archipel perdu au bout du monde, les villageois sont pauvres et quand ils ne peuvent plus élever leurs enfants trop nombreux, ils les déclarent tabous et peuvent les jeter à la mer sans problème. Pour éviter ce triste sort à son fils, la mère espère qu’un des fonctionnaires voudra bien le prendre comme esclave. Mais l’esclavage est aboli depuis plus de trente ans et personne ne veut se mettre en tort, sauf Merle, un tout jeune fonctionnaire qui connaît bien les îles et leurs coutumes aussi accepte-t’il Liesse pour le sauver. Tous les fonctionnaires se prennent d’affection pour l’enfant et l’instruisent, il devient garçon de course, puis adjoint de Merle, le secrétaire du comptoir. L’empire envoie une nouvelle gouverneure, Melvine Zélina de Félarasie, une descendante de la lignée impériale, même si le dernier empereur a disparu depuis des siècles. La jeune femme a de grand projets pour le développement de l’archipel. Plus tard, Liesse devient son adjoint et ils s’embarquent tous deux dans un voyage pour Solméri, une Cité-Etat lointaine dont Malvine vient d’être nommée gouverneure.

A ce moment le récit prend une nouvelle direction et on comprend enfin son classement en imaginaire. Les personnages prennent une autre épaisseur et leurs aventures dépassent leur simple rôle administratif. On est ici dans une magie très subtile, pas de sorcière, d’animaux fantastiques ou d’épée magique, mais une uchronie qui joue sur le voyage temporel, grâce à un beffroi en panne depuis des siècles mais dont la fonction, contrairement aux apparences, n’a jamais été de donner l’heure. Malvine sera la première à en faire l’expérience, avant que le drame ne touche Solméri.

Il y a une bataille dans le roman, mais une seule et pas trop longue, ce que je trouve très appréciable dans un roman fantasy. Malvine et Liesse sont des personnages attachants, il font face à l’hostilité de leurs administrés, car l’empire est en déclin et l’administration locale n’accepte plus son autorité. Ce conflit causera la catastrophe qui a presque anéanti la cité.

Liesse est un personnage très intéressant, il a été rejeté par son village, lorsqu’il est garçon de course, il a de nombreux amis parmi les enfants de la ville, mais en grandissant il devient trop « impérial » à force de vivre au comptoir et d’adopter ses valeurs, ce qui lui vaut un nouveau rejet. Il est étranger partout et malgré l’affection des autres fonctionnaires, il n’est pas des leurs, ce qui le force à accompagner Malvine. Il aura d’autres problèmes d’identité à Solméri, ce qui lui permettra de parcourir les diverses strates sociales selon les aléas de son existence et d’affuter son regard sur l’empire déclinant, puis la nouvelle Solméri où toutes les cartes ont été brassées. Il se montre fidèle à Malvine au-delà de sa mort et perpétue sa mémoire. C’est un personnage très attachant et riche. Les deux personnages principaux font preuve de résilience, ils ne baissent jamais les bras face à l’adversité pour essayer de donner un meilleure avenir à leurs proches.

Les paradoxes temporaux sont aussi très intéressants, j’aime ce genre de fantasy peu commune. Je suis toujours épatée par l’imagination des auteurs imaginaires qui créent des univers riches, à la fois proche du nôtre et en même temps complètement différents. On assiste à la fin d’un monde, après des années de crise, une société nouvelle et plus égalitaire surgira du chaos, les peuples sauront s’unir pour s’assurer d’un avenir meilleur.

J’ai beaucoup aimé ce roman que j’ai trouvé original, mais je n’ai pas beaucoup de point de comparaison, lisant peu de littérature imaginaire. Un grand merci à Netgalley, Audiolib et aux Forges de Vulcain pour cette très belle découverte

Voir plus d'avis
AUTRES LIVRES DE Claire Duvivier4
DOLPO RECOMMANDE4

Livraison soignée

Nos colis sont emballés avec soin pour des livres en excellent état

Conseil de libraires

et des sélections personnalisées pour les lecteurs du monde entier

1 millions de livres

romans, livres pour enfants, essais, BD, mangas, guides de voyages...

Paiement sécurisé

Les paiements sur notre site sont 100% sécurisés