Ils ont tué Oppenheimer
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La vie trépidante du père de la bombe atomique
Dans un roman habilement construit, Virginie Ollagnier part à la recherche de Robert Oppenheimer. Esprit brillant poursuivi par les maccarthystes, il offrira une belle résistance aux obscurantistes avant de devoir céder.
En novembre dernier pour CNews Lyon, Virginie Ollagnier a raconté comment elle a rencontré Oppenheimer et comment le scientifique américain est devenu l’objet de toute son attention: «Il y a deux départs. À 13 ans en classe de physique chimie, il y a un portrait d’Oppenheimer, j’ai l’impression qu’il me regarde, je le trouve magnifique mais aussi triste, il me touche, je tombe amoureuse de lui! En 2015, dans une librairie, je tombe sur la biographie d’un scientifique, en une, une photo d’Oppenheimer. Je me dis, Robert que fais-tu là, qui es-tu? Je la lis, c’est scientifique et compliqué, c’était un esprit brillant, mais je veux savoir qui est derrière ce regard. Je commence à souligner ce qui m’intéresse. Les dates, des faits. Je prends des notes. Le déclic viendra quand, au cours de mes recherches, je me rendrai compte qu’il a été écouté par le FBI, c’est ça le monde libre? À travers son histoire, j’y vois alors la mort de la gauche américaine.» Le roman qui paraît aujourd’hui reflète bien la complexité du personnage et les enjeux géopolitiques liés à ses recherches et à ses engagements. Quand en 1942, le FBI a commencé à s’intéresser à lui, «Oppenheimer était un physicien non nobélisé, sans expérience de projets d’envergure, il n’était pas une figure tutélaire du monde scientifique, à peine plus qu’un excellent théoricien, célèbre et peu publié.» Voilà les faits, voilà une face de la médaille. L’autre montre «un scientifique débordant d’enthousiasme communicatif, admiré de ses pairs et prêt à secouer tout ce petit monde pour obtenir des résultats, il comprenait et partageait ses soucis et, miracle, répondait aux questions qu’il n’avait pas encore formulées, Et ça, c’était une première. Le physicien proposait des solutions pratiques, matérielles […] Un homme d’action, quoi.» Pendant de longues années c’est cette face brillante qui aura le dessus.
Virginie Ollagnier nous raconte comment, quelques mois plus tard, malgré des rapports le qualifiant de gauchiste, il est nommé directeur scientifique du Projet Manhattan et comment il va créer à Los Alamos, le laboratoire national qui va mettre au point les trois premières bombes atomiques de l’Histoire. S’il a choisi ce coin désertique du Nouveau-Mexique, ce n’est pas pour son isolement, mais parce qu’il a ici des souvenirs forts. Au début des années 1920, il y fait un séjour qui va le marquer. Au sortir de l’adolescence, il se prend pour un cow-boy, fait du cheval et galope en compagnie de Katherine Chaves-Page. «Très vite il était tombé amoureux du regard posé sur lui. Il avait redressé la tête, bombé le torse et tenté d’impressionner la cavalière. Pour la première fois, il voyait la fin de son enfance comme un espoir. Il existait un moment proche où l’incompréhension dans laquelle il se débattait depuis son entrée à l’école prendrait fin. Un temps où il aurait une place. Il n’avait jamais été enfant et, s’il était né vieux, ce n’était bientôt plus une fatalité.»
L’amour, la jalousie, la convoitise, la vengeance ou encore la soif de reconnaissance et de pouvoir. Voilà les sentiments qui donnent à ce roman toute sa puissance.
Il y est certes question des recherches du «père de la bombe atomique», mais il y surtout question des hommes et de leurs rivalités. Et d’une volonté farouche qui permet de franchir bien des obstacles. Car si les maccarthystes font finir par avoir sa peau, il n’aura de cesse de vouloir être réhabilité.
En choisissant de nous faire partager le résultat de ses recherches et ses hypothèses, Virginie nous propose une construction très originale qui délaisse la chronologie pour les temps forts, qui marie la marche du monde aux réflexions des scientifiques. Il est vrai qu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale guerre, ils auront vu l’usage de leur arme de destruction massive et refuseront, pour beaucoup d’entre eux, d’aller plus loin dans cette folie. Autour de Robert Oppenheimer, les atomes n’ont pas fini de graviter !
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