
Que passe l'hiver
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l’avis des lecteurs
Que passe l’hiver est une très beau roman de fantasy, un chant doté d’une très grande force poétique. Je l’ai lu en quelques jours, happée par l’intrigue et l’ambiance particulière qui se dégage du récit. Ce roman est paru aux éditions de l’homme sans nom en 2017, et a été nominé au Prix Imaginales 2018. David Bry, son auteur, a été désigné « coup de cœur » aux Imaginales en 2019.
Ce qui m’a frappé d’abord, c’est l’ambiance, l’atmosphère qui se dégage du roman. J’ai sans cesse oscillé entre froid glacial et sensation d’étouffement générée par le huis-clos du récit. Cette ambiance, plus qu’un cadre, est donc porteuse de sens. J’ai également beaucoup aimé la forme narrative, proche de la poésie chantée.
Personnages et cadre du récit
Les familles et la mythologie
Le roman s’organise autour de 4 familles régnantes, qui se partagent les terres : les Feyren (Stig en est le cadet), les Dewe, les Oren et les Lugen. Ces familles sont liées au roi de l’hiver; roi symbolique, avec peu de pouvoir, mais qui fait le lien entre les Hommes et le monde souterrain où vivent les Dieux. A chaque famille, ses marques, ses insignes, et ses dons. Par exemple, les Oren voient dans les fils du destin; les Feyren se métamorphosent en animaux. Stig est un corbeau, voler pour lui est synonyme de liberté, quand sur Terre son pied bot l’entrave.
Chaque année, au solstice d’hiver, les 4 familles se réunissent au Wegg, prêter serment à leur roi de la Clairière. Les Hommes retrouvent les légendes et les contes régissant leurs croyances, pour quelques jours, et pour toute l’année qui suit.
Les mythes et les croyances régissent la vie des familles. Le roi de l’hiver fait le lien entre les Hommes, sur Terre, et les Dieux, notamment Urian, assis sur son trône au cœur du monde souterrain. Urian, au cœur de la Montagne du Destin, crée et développe tous les fils des possibles. Seuls les Oren peuvent les lire, les interpréter, chercher quel fil se réalisera.
La tension s’accroît
Le récit est construit en pente douce, ascendante. Jamais le souffle ne redescend. La tension et l’inquiétude montent très rapidement, avant même la mort de Conrad Dewe. Dès la fin de la strophe 2, l’ambiance lourde, pesante et menaçante est posée (« aucun des deux ne remarque alors le scintillement dans les bois non loin d’eux, ni le vent étrange qui s’élève et souffle soudain en direction du Wegg, comme le ferait un esprit derrière le Voile »). Le début du roman donne donc rapidement le ton, et cette tension inquiète ira crescendo tout au long du récit, jusqu’au point d’orgue final. C’est une très longue protase, qui se déroule, lentement et implacablement.
Que passe l’hiver : une ambiance hivernale et inquiétante
Un huis-clos étouffant
Pour commencer, le récit se déroule dans un espace-temps très restreint. Les événements se succèdent à un rythme soutenu, et ce sur quelques jours seulement. D’autre part, l’espace est majoritairement limité à la salle du banquet, et aux tours dans lesquelles logent les familles. Les quelques percées en dehors de ces lieux sont même dangereuses (la recherche de l’âme dans la Clairière dans les bois, qui se finit dans le sang; la falaise, lieu de suicides…). Le dernier vol de Stig le cloue au sol. Enfin, quand il veut revenir sur ses terres, son père lui interdit de le faire. Peu à peu, l’étau se resserre autour des personnages.
Cet étouffement est d’ailleurs renforcé par la narration. Au huis-clos du récit répond un enfermement du texte sur lui-même.
En effet, la narration au présent crée une instantanéité. On vit les événements en même temps que Stig. Par ailleurs, elle est construite sur de très nombreuses répétitions (l‘anaphore « aussi loin que nos mémoires remontent, aussi loin que nos mémoires s’en souviennent… » scandant le chant du conteur; ou celle encore qui guide les pas de Stig à la découverte du corps d’Umbre). Ces répétitions semblent accompagner les personnages dans une spirale de folie, tournant en rond, seuls avec leurs questions sans réponse (à l’image de Stig, ne sachant plus vers qui se tourner ni que faire, ou encore Oswald, berné par les autres et englué dans son désir de vengeance…).
Enfin, les commentaires extradiégétiques du narrateur, associés aux augures des prophétesses, renforcent la tension en évoquant l’imminence de la catastrophe.
L’atmosphère hivernale : plus qu’un décor, un élément de sens
Le récit se déroule en hiver. Les descriptions rendent bien les sensations de froid ressenti, glacial, piquant. J’ai aimé entendre la neige qui crisse sous les bottes de Stig, voir les flocons virevolter dans l’air, sentir mes oreilles glacées par le vent. A ces impressions sensorielles s’ajoutent des camaïeux de blancs, gris et noir, constitués en aplats (la plaine pâle, les tapis blancs de neige…).
Mais ce décor en apparence fade et triste révèle des traits marquants, qui s’en détachent, à l’image de la couverture du livre. Les détails de l’intrigue apparaissent alors de manière plus violente et plus acérée, et sont porteurs d’indices (le regard noir perçant de Theudeusinde, la lueur dans la forêt lors de la recherche de l’âme de la Clairière…). Il y a un jeu de clair/obscur permanent dans le roman. Au scintillement de la neige brillante, répond un monde d’ombres, qui accentue la tension du récit. Au fur et à mesure de l’histoire, les personnages ne se dévoilent plus directement. Ils deviennent des ombres, des silhouettes, révélées par la lumière d’un rayon de soleil qui filtre à travers la meurtrière. Plus rien n’est visible, direct, franc, tout devient caché, renforçant l’impression d’étouffement.
Ce décor n’est donc pas un simple arrière plan. Il est porteur de sens. Les éléments accompagnent d’ailleurs la montée en puissance de la tension (l’hiver de plus en plus rude, la neige qui tombe de façon plus soutenue, la tempête provoquée par Umbre lord de la rixe entre Stig et Johan; même la lumière est tranchante et froide). Stig, qui sait écouter le chant du vent, qui connaît la Clairière, le sens des éléments, le langage de la nature, en est d’ailleurs conscient et pressent ce danger ambiant.
« Un fil se brise, un autre se renforce… »
Un récit musical et poétique
Le roman est très musical, et j’ai beaucoup aimé cette ambiance. On a déjà parlé de sa structure ascendante plus haut. De plus, chaque chapitre est couronné d’une strophe en vers. Ces strophes constituent chacune une pièce du puzzle qu’est le récit. On trouve l’ensemble du poème en fin de texte, et la cohérence d’ensemble se détache alors plus nettement.
Par ailleurs, une des premières scènes du récit se déroule lors de la cérémonie d’ouverture de la fête du solstice, et cette soirée est faite de musique et de danse. Lors du banquet, le conteur raconte les contes et légendes des origines. A l’image de l’aède grec ou du troubadour, il raconte seul face à l’assemblée les récits fondateurs. Dame Sigrune évoque une ode, mais c’est plutôt une épopée qui est racontée ici. Le texte, en italique, est en fait un long poème en prose, récité et chanté par le conteur, et rend compte des événements des origines et des hauts faits des premiers rois. C’est le « chant des Ordrains ». Plus loin, un autre conteur, Vulf, va raconter à son tour les origines de la maison Feyren.
Enfin, le récit oscille entre silence pesant et mortel et échos, contribuant aussi à créer cette ambiance mystérieuse (le silence de la plaine grise, les échos des sabots du cerf qui martèlent le sol…). Les sons font sens, comme les non-dits, les hurlements et les susurrements, le dialogue de sourd entre Oswald et son cadet…
Un refrain porteur de sens
Cet aspect musical se ressent avec la répétition constante du refrain « Un fil se brise, un autre se renforce ». Sorte de fond musical, ce refrain ponctue le récit, crée le suspense. Il suit chaque événement majeur, mais en annonce, aussi. Cette espèce de voix off structure le récit.
D’autres refrains apparaissent aussi dans le roman, comme le titre, plusieurs fois répété, comme une prière (« Que passe l’hiver / O, que passe l’hiver »), repris dans le récit du conteur (« Pour que jamais ne passe l’hiver sans roi »). Il y a une espèce d’effet rouleau compresseur créé par ces répétitions, ces redondances, qui accompagnent bien le récit et contribuent à poser l’ambiance et le cadre.
J’ai aussi aimé la beauté de la langue, je l’ai trouvée douce et mélodieuse, tant dans les descriptions des soirées bruyantes et colorées, que dans les descriptions des paysages mornes. Il y a une fluidité dans ces passages très agréable, et qui tranche avec la venue des événements dramatiques. Que passe l’hiver souffle le chaud et froid d’une manière déstabilisante, et j’ai beaucoup apprécié ça.
Des fils et des chemins…
Le chemin de la quête de soi
Au-delà de la beauté formelle de cette œuvre, j’ai aussi apprécié le sens du texte. On suit donc Stig, jeune cadet mal aimé de son père, orphelin de mère, et handicapé par son pied bot. Le roman s’ouvre sur l’arrivée des Feyren à la Clairière pour la fête du Solstice, première à laquelle Stig peut assister. C’est une sorte d’initiation pour lui, et tout le roman qui suit va confirmer son statut de héros de roman d’apprentissage.
Assez naïf, il préfère les contes des forêts et les légendes à la vie de chef, et de gestion des terres. Il s’est habitué à ne pas être remarqué, et ça lui va bien. Oui, mais ça ne peut pas marcher comme ça quand on est le héros d’un roman ! Evidemment, Stig va se trouver au cœur des événements terribles et menacé lui-même. Il va alors devoir tout apprendre, se fier à ses instincts, se faire des alliés, se faire une raison, et surtout, grandir et affronter enfin son père. Stig va apprendre la perte, la douleur, affronter l’incompréhension, l’impuissance, la duplicité. Enfin, il va aussi se (re)trouver, comprendre ce qu’il est, qui il est, retrouver ses racines, remettre en question ses acquis.
Que passe l’hiver se déroule sur très peu de jours, mais Stig aura appris beaucoup plus sur lui que dans toute son existence. Il aura grandi, mûri : à la fin du récit, Stig est adulte.
Le destin // le libre arbitre
La question au cœur du récit est celle du destin et du libre arbitre. Certains ont pu trouver ce sujet réchauffé et pas original. C’est vrai que cette thématique est très souvent au cœur des récits d’imaginaire (et pas que d’imaginaire d’ailleurs). Mais est-ce vraiment un sujet épuisé et à bannir des romans ? Je n’en suis pas sûre, d’autant que j’ai trouvé son traitement ici intéressant.
La question du destin et de l’avenir tracé des hommes est au cœur de la mythologie du récit. En effet, c’est le roi au fond de sa montagne du Destin qui crée les fils des possibles, autant d’échos (tiens ! ce n’est pas moi qui utilise ce terme, c’est le roi lui-même !) qui se font entendre. Les Oren savent déchiffrer les fils, et définir ce qui pourrait se passer – ou pas. Et c’est précisément cette question de prédestination et de libre arbitre qui est le sujet du roman. Il y a un débat intéressant sur les actions des Hommes : ceux-ci sont-ils responsables, sachant que c’était de toute façon écrit ? L’Homme en agissant ne choisit-il pas un fil parmi d’autres ?
J’ai aimé la représentation visuelle de ces fils du destin (la montagne à gravir en rêve), qui se nouent, se dénouent, s’enchevêtrent, se mélangent… autant de nœuds, de mélanges, d’enchevêtrements… Les images et métaphores des chemins, nœuds et labyrinthes (et que j’aime les labyrinthes !!) sont filées tout au long du récit, et reflètent finalement ce qu’est la vie : se perdre, se retrouver, prendre un chemin, se tromper, recommencer, rebrousser chemin…
J’ai trouvé une cohérence, encore, entre le sujet traité et sa représentation, mythologique, et philosophique. Alors oui, peut-être n’a t-on ici que quelques bribes d’une réflexion majeure qui nécessiterait d’en dire plus. Mais enfin, c’est un roman que David Bry écrit, pas une thèse de philo sur le sujet du libre arbitre…
Vers la mort de la magie : le chemin des hommes
Et finalement, ce que j’ai le plus aimé dans cette réflexion sur le sujet, c’est l’endroit où elle nous amène. Car ce roman raconte le choix des Hommes à se détacher de leur roi et de leurs Dieux pour retrouver leur libre arbitre. Ce faisant, on en arrive tout simplement à… notre monde d’aujourd’hui, dénué de magie dans les arbres et les étoiles, délesté de ses récits folkloriques, de ses histoires de grand-mères, de ses croyances reléguées au plus profond de chacun et plus vraiment rassembleuses…
Le roman raconte cette métamorphose du monde. Et plus encore, il raconte comment subsiste aujourd’hui cette magie : par le langage, qui fait renaître, dans les mots et la création poétique, les mythes, contes et légendes oubliés.
Alors oui, Que passe l’hiver ne raconte pas l’après. Mais à mon sens, il n’y a pas d’après. Le roman une transition, et se termine de façon magistrale. Savoir si Stig va se marier et avoir beaucoup d’enfants importe peu, en fait. Savoir comment la vie va s’organiser désormais, délestée de ses attaches religieuses qui l’ont construite… c’est une autre histoire à raconter, qui n’aurait pas eu sa place ici.
Conclusion
Bon, je crois que vous avez compris, j’ai adoré Que passe l’hiver. Je viens de découvrir la plume de David Bry, je lirai ses autres œuvres avec plaisir. J’ai aimé la beauté du récit, sa forme, sa structure, sa poésie, ses jeux de lumière. J’ai alterné entre les bercements doux de la narration, l’inquiétude générée par la tonalité de fond, et la frayeur face la violence implacable. Enfin, j’ai aimé suivre les personnages, me perdre dans tous ces fils, m’embrouiller l’esprit… Pour moi, cette œuvre est une merveille. La princesse au visage de nuit m’attend… 🙂
David Bry était le coup de cœur des Imaginales cette année. Il écrit depuis 2009 dans plusieurs genres de l’Imaginaire allant du polar d’anticipation à la fantasy épique. Cela faisait quelques temps que je voulais découvrir cet auteur et son roman Que passe l’hiver précédemment édité en avril 2017 aux éditions de l’Homme sans Nom. C’est un tome unique qui vient d’être réédité chez Pocket en avril dernier. Le roman avait été nominé au Prix Imaginales 2018.
J’ai été attiré par ce roman en partie pour son univers qui m’a fait penser aux pays nordiques. Même si le roman ne se situe pas à proprement parler dans un pays lié aux vikings, on trouve dans son univers et dans l’ambiance qui s’en dégage un côté nordique marqué et très plaisant. Le roman suit le parcours de Stig, jeune homme de 20 ans. Stig fait partie du clan des Feyren, il est le fils cadet du seigneur du clan. Cependant, il est affublé d’un pied bot et son père lui préfère son frère ainé comme héritier. Néanmoins, cela ne l’empêche pas d’avoir trouvé une forme de bonheur et de liberté. Surtout qu’il va bientôt participer à son premier solstice d’hiver, cérémonie très importante et très ancienne où tous les clans viennent sur le Wegg en l’honneur du roi de la Clairière. Le but de la célébration est de renouveler l’allégeance des clans au roi de la Clairière. Ce n’est pas un roi ordinaire ni un humain. Il symbolise le lien entre les hommes et les Dieux, surtout Urian le dieu sombre qui règne sur le monde des morts.
Cette cérémonie m’a fait penser aux cérémonies nordiques qui avaient lieu à Uppsala en Suède. Ces célébrations avaient lieu en l’honneur des dieux nordiques tous les 9 ans et concernaient tous les clans de Suède. Ceux-ci venaient pour faire des offrandes aux Dieux et prendre part aux rituels sacrés. Le roman se déroule principalement dans la nature et celle-ci a une grande place dans le récit au travers de la forêt, du roi de la Clairière. Les descriptions des paysages sont superbes, on se prend à rêver de ces forêts enneigées, des falaises bordant la clairière. Toutes ces influences donnent une ambiance particulière au roman. Cette atmosphère qui ressort des paysages, du froid, du lien avec la nature, de la cérémonie du solstice, est très travaillée et apporte un gros plus au roman. L’univers offert par David Bry est fascinant, particulièrement réussi et immersif. Le lecteur découvre peu à peu les éléments qui le constituent, la magie des clans, le lien entre les hommes et les divinités, et se laisse envoûter par cet univers et son ambiance.
La magie est présente dans l’univers mais sous forme de pouvoirs que possèdent les clans. Ces pouvoirs viennent d’Urian et chaque clan a un pouvoir différent. Les membres du clan de Stig ont le pouvoir de changer de forme et Stig peut ainsi se métamorphoser en corbeau. Les Lugen peuvent invoquer des esprits, les Oren lire dans les fils du destin et ainsi voir une partie de l’avenir. Les membres du dernier clan, les Dewe, peuvent se dissimuler dans les ombres. Ces pouvoirs paraissent assez puissants mais sans vraiment être disproportionnés. Ils ajoutent un aspect un peu mystique, un peu étrange à l’univers.
L’intrigue peut paraître assez classique au début puis s’oriente vite vers un huis-clos étouffant dans des paysages gelés et oppressants. Le lecteur a ainsi l’impression d’assister à une tragédie qui se déroule sous ses yeux, un drame qui avance inexorablement. David Bry prend son temps pour poser son récit, ses personnages, son univers. Les péripéties sont nombreuses mais il est vrai que le rythme est un peu lent par moments. Cela ne m’a pas dérangé mais c’est à souligner. L’auteur tisse ses fils avec brio sur un rythme envoûtant et avec une plume particulièrement belle et poétique. On trouve d’ailleurs en introduction à chaque chapitre des vers qui renforce l’aspect poétique et légendaire du récit.
Stig est un personnage assez jeune pour lequel la fête du solstice symbolise le passage à l’âge adulte. Il a un côté un peu naïf par certains aspects, mais est également très attachant par d’autres. Il est différent des autres, ce qu’il a réussi à transformer en force. Il est vraiment au centre du récit et les personnages secondaires sont globalement assez peu présents, bien qu’ils soient intéressants également et variés.
Que passe l’hiver est ainsi un excellent roman sous forme de huis-clos glacial. L’univers et l’atmosphère qui en ressort sont les gros atouts de ce roman. La tension est très présente tout au long du roman et augmente au fur et à mesure que le drame prend forme. On se laisse prendre par la magie de ce roman, par sa froideur et par la plume poétique de David Bry.
Et de 4 ; même si ça pique toujours autant. Je commencerais pour une fois par dire que la période joue sans doute plus que jamais dans mon ressenti ; je suis pas forcément dans une forme olympique, donc une certaine forme d’aigreur alliée à une profonde lassitude font que je suis sans doute encore plus sévère que d’habitude.
Mais si David Bry, d’une certaine manière, a joué de plus de malchance que d’autres auteurices sur ce blog lors de cette lecture, je sais aussi, quand même, identifier avec lucidité les points de contention menant à ce que j’abandonne cette découverte avant même la moitié.
Et comme toujours, si je n’ai pas eu le courage nécessaire pour aller au bout, et bien que je pense avoir le droit sacré et inaliénable de ne pas le faire ; j’estime tout qu’il est de la plus élémentaire correction à l’échelle de mon travail de chroniqueur d’expliquer pourquoi. Sans acrimonie, évidemment, mais avec clarté, tout de même.
Et disons le clairement, je me suis beaucoup ennuyé. Ces 176 pages manquaient d’audace, au moins un petit peu. C’était pas mauvais, mais c’était pas assez bon non plus. Une forme d’académisme circonspect dans la présentation des enjeux premiers et des personnages, une trop longue et indigeste présentation du monde et de ses règles, d’une manière trop guindée, jusque dans les dialogues ; j’avais l’impression de lire un auteur manquant de confiance en sa propre histoire et ses symboliques, ou pire, dans son lectorat, pour lui laisser le soin d’éventuellement relier les points lui-même. En comblant absolument tous les trous potentiels ou anticipant toutes les interrogations d’une façon me laissant déduire la crainte d’être accusé du moindre manquement, quitte à faire passer ses angoisses au premier plan, négligeant ainsi sa matière première, David Bry m’a perdu très vite. Trop d’exposition brute, balancée d’une façon artificielle et trop directe, sans laisser les personnages seulement exister en dehors de quelques points centraux – nécessairement archétypaux – répétés ad nauseam pour ma perception, j’ai saturé.
Et pourtant, je sentais bien qu’il y avait quelques concepts, quelques bonnes idées éparpillées là dedans, mais complètement eclipsé·e·s par un rythme étrange et assez indescriptible ; appuyant très longuement certaines descriptions ou éléments subsidiaires pour ensuite en écarter rapidement d’autres qui me paraissaient plus importants, voire essentiels. Et du coup, oui, je me suis très vite ennuyé, parce que les enjeux finaux me paraissaient clairs, certes, mais les jalons intermédiaires étaient flous, chaque question se voyant être répondue par une énigme ou un nouveau mystère qui s’ajoutait aux précédents, via des changements ponctuels de point de vue que je trouvais maladroits. Et si j’aime bien être mené par le bout du nez, j’aime bien avoir quelques petits éléments à intervalles réguliers pour sustenter un peu ma curiosité et surtout avoir une vague impression de pouvoir deviner ce qui m’attend. Ici, j’avais surtout le sentiment que tout allait s’accumuler indéfiniment jusqu’à un rush final de révélations et de retournements de situation, un format d’histoire et de résolution dramatique dont je ne suis vraiment pas friand s’agissant d’intrigues politiciennes en fantasy.
Et enfin, je dois aussi dire que le personnage principal, et surtout son traitement, ne m’ont pas aidé à m’investir dans le roman. Si je salue l’intention d’intégrer à ce récit un personnage handicapé, avec la claire volonté de le faire dépasser cette infirmité par ses qualités propres, symboliquement au moins, je ne peux pas dire que j’ai été convaincu. D’abord à cause du constant et assez insupportable rappel à ce handicap comme la caractéristique principale du héros, y compris et surtout dans des contextes narratifs ne le justifiant absolument pas. J’aurais dû compter dès le départ combien de fois est faite mention de ce handicap, mais je pense qu’on approche facilement de la vingtaine en 176 pages, et c’est beaucoup trop. Si je pense avoir compris l’idée de vouloir intérioriser ce que le personnage perçoit de son infirmité, en faisant un aspect inévitable de ce qu’il est, pas encore capable de comprendre que ce n’est qu’un détail dans la myriade de qualités qui le définissent, je ne trouve pas que cela ait été particulièrement réussi. Et de fait, j’ai très vite soupiré ou froncé les sourcils à chaque mention faite. Ç’aurait pu n’être qu’un détail dommageable à l’échelle d’un récit globalement réussi, cela a fini par être – sans doute injustement – un de mes points de contention me poussant à laisser tomber : je ne pouvais plus lire cet élément être répété encore et encore avec à chaque fois un peu moins de subtilité
Voilà, je dirais que ce roman manquait trop cruellement de subtilité pour moi. J’avais l’impression, malgré l’épais mystère de son intrigue, d’être en terrain trop familier, d’avoir déjà lu quelque chose comme ça beaucoup de trop de fois, sans assez de réelles variations pour me donner envie de continuer et d’en découvrir plus : ça manquait de souffle, tout simplement. Peut-être que la suite et la conclusion auraient pu me donner tort, mais ce premier tiers ne m’a pas donné assez de gages de confiance pour que je me donne cette peine. Alors comme toujours, je donnerai sans doute une autre chance à David Bry, un jour. Mais pour ce coup-ci, c’est raté.
À charge de revanche : je sais que des maisons d’édition de qualité chouchoutent certains de ses textes, ce n’est sans doute pas pour rien.
Quatrième de couv’ :
Stig vient d’avoir vingt ans, l’âge de porter une épée et de se rendre – enfin ! – sur le Wegg, l’étrange montagne où réside son souverain, le roi de la Clairière. Mais son premier solstice d’hiver ne se déroule pas comme il l’avait imaginé. À peine le jeune seigneur est-il arrivé que la mort répond aux augures néfastes et que les fils enchevêtrés du destin tissent un avenir que personne, ni homme ni dieu, semble pouvoir prédire. Menacé sans qu’il en comprenne la raison, Stig aura fort à faire pour découvrir ce qui se trame dans l’ombre des festivités, protéger ceux qu’il aime… et même survivre. Y parviendra-t-il ? À la croisée de l’ode initiatique et du huis-clos, Que passe l’hiver raconte le destin d’un jeune homme au pied bot et d’un roi aux longs bois de cerf, pris dans le maelström d’un monde qui se meurt, peut-être…
Mon avis :
Il y a ceux qui aiment lire selon les saisons et ceux comme moi qui ont l’esprit de contradiction chevillé au corps et qui aiment lire les bouquins remplis de neige et de blizzard…le cul bien calé dans le transat ^^, c’est parti pour la présentation de Que passe l’hiver :
A l’origine de ce monde, les dieux appelés Ordrains, étaient 5. 4 d’entre eux ont chacun créé une race d’Hommes et le 5ème, appelé Roi de l’hiver, garde la Clairière où tous les clans se réunissent à chaque solstice d’hiver pour renouveler leur allégeance. Les clans se composent des Oren qui ont le don de deviner la destinée des individus (voyants), les Feyren qui sont des changeurs de forme (métamorphes), les Lugen qui pactisent avec les esprits (magiciens) et les Dewe qui marchent dans les ombres (téléportation). On se rend rapidement compte que les clans ne se mélangent pas habituellement entre eux et il règne une certaine compétition en vue de la quête de l’âme de la Clairière qui a lieu le dernier jour et permettra au vainqueur d’être le premier à renouveler son allégeance à Cudwich le Roi de l’hiver, c’est un immense honneur….mais cette année est différente.
Stig est notre jeune héros. A 20 ans, âge qui fait de lui un homme, il participe pour la première fois à ce grand rassemblement ce qui le rend hyper excité, malgré un incident de cheval, rien n’entache son bonheur et il se révèlera très impressionné par le Wegg mais cette première soirée tournera court avec la mort du seigneur Conrad Dewe. Tout le monde dit qu’il s’est étouffé mais Stig qui le regardait à ce moment-là est loin d’être persuadé de l’accident surtout que la prophétesse de son clan l’avait prévenu des mauvais augures. Les morts vont s’enchaîner et avec l’aide de ses nouveaux amis il va tenter de trouver ce qu’il se passe dans la Clairière. Une véritable course contre la montre s’engage entre tentatives de meurtre sur Stig et l’enquête qu’il mène à l’aide de son groupe d’amis, leurs soupçons se tournent rapidement vers Theudeusinde Lugen qui avait l’air étrangement satisfaite à la mort de Conrad mais Stig va rapidement se rendre compte que les choses sont bien plus complexes que ça.
J’ai lu ce livre assez rapidement, ce huis-clos nous emporte mené par un style très agréable malgré des chapitres longs. Un héros handicapé par son pied bot, orphelin de mère et méprisé par son père pour son infirmité, il a construit avec son frère ainé une relation très forte même s’il avoue l’avoir envié plus jeune. L’auteur a été franchement sadique avec son héros et ne lui a rien épargné, une véritable tragédie se déroule sous nos yeux sans qu’on ne puisse rien y faire à part avoir nos petits coeurs meurtris pour Stig.
En bref, une belle lecture, un premier essai transformé avec cet auteur, j’ai regardé vite fait sa bibliographie, Contes désenchantés à l’air pas mal mais les Editions Lokomodo n’existent plus j’espère donc qu’il sera réédité ou qu’un nouveau roman va voir le jour, les autres livres de fantasy me paraissant plus classiques.
Avec Que passe l'hiver, David Bry signe une fantasy aussi sombre que poétique.
Résumé :
Bien loin du fracas des armes et de la violence des grandes batailles, l'auteur suit la vie du jeune Stig Feyren qui s'apprête à fêter son premier solstice d'hiver. Toute à sa joie de venir vivre cet incroyable événement, d'assister enfin aux grands banquets, d'écouter les conteurs transmettre les plus fabuleuses légendes au coin du feu, de participer aux grandes chasses, d'échanger avec les autres clans, et surtout de rendre hommage au dieu Urian, il n'imagine pas un seul instant que cela puisse dérailler quelque-part. Mille fois rêvés grâce aux souvenirs de son frère Ewald, il attend d'y participer à son tour avec grande impatience. Seulement les festivités vont très vite s'entacher d'une touche mortelle lorsqu'un premier chef de clan meurt subitement. Un décès qui va jeter un froid et assombrir les réjouissances. D'autant que d'autres drames vont se succéder, et notre jeune Stig va même vite se retrouver en ligne de mire. Pour quelle raison, lui, le cadet d'un chef de clan dont tout le monde se moque, dérange-t-il autant? A lui de le découvrir ainsi que la ou les instigateurs qui se cachent derrière cette terrible menace ?
Mon avis :
L'univers imaginé par David Bry se nomme La Clairière. Il est peuplé de quatre clans: Feyren, Oren, Lugen et Dewe qui vivent en bonne intelligence sous l’œil bienveillant d'Urian. Ils se confortent à la volonté de leur dieu qui leur a accordé à chacun un don. Ainsi, les Feyren ont la capacité de se transformer en animal, les Oren lisent les fils du destin, les Dewe se fondent dans l'obscurité et deviennent donc invisibles et les Lugen peuvent appeler à eux les esprits se trouvant de l'autre côté du voile.
Cette apparente paix est bien évidemment trompeuse car Que passe l'hiver est avant tout une tragédie. L'auteur ne conçoit pas d'écrire une indulgente petite histoire. Le mal rôde, blesse et tue des êtres chers. Personne n'est épargné et surtout pas Stig qui voit ses illusions volées en éclats les unes derrière les autres.
Infirme, né avec un pied-bot, il est le paradoxe du guerrier. Détesté par son père, orphelin de sa mère, Stig n'a que son frère comme seul soutien. Alors comment cet être d'apparence si fragile peut venir à bout d'une menace quelle qu'elle soit ? Lui qui n'a pour seule arme que sa bonté et son ouverture d'esprit. Mais saura-t-il démêler les augures avant qu'il ne soit trop tard ? Avoir fait ce choix de héros est un défi réussi pour l'auteur car Stig nous émeut au plus profond de notre cœur et c'est avec un bel entrain qu'on plonge dans son aventure.
Tragédien, poète, conteur, David Bry arbore bien des casquettes pour nous narrer son histoire. On est subjugué par la verve de ce talentueux auteur qui nous emporte bien loin dans sa chimère.
On traverse ce roman comme dans un rêve, littéralement ensorcelé par la beauté des lieux que l'on découvre à travers le regard candide et émerveillé de Stig. C'est un voyage au pays des merveilles que nous offre David Bry où la magie côtoie tout de même la cruauté, la perfidie et la trahison car telles sont les conditions pour écrire une grande fresque romanesque. Alors attention à ne pas se laisser duper.
En conclusion :
Tantôt mélancolique, tantôt captivant, ce roman nous fait perdre très vite pied. Il devient une telle obsession qu'il est même douloureux de le lâcher.
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