La Grande Arche
  • Date de parution 24/08/2017
  • Nombre de pages 400
  • Poids de l’article 203 gr
  • ISBN-13 9782072720192
  • Editeur FOLIO
  • Format 180 x 115 mm
  • Edition Livre de poche
Biographies, Mémoires

La Grande Arche

3.85 / 5 (213 notes des lecteurs Babelio)

Résumé éditeur

Selon une légende presque universelle, on ne peut pas construire un monument si un être humain n'est pas sacrifié. Sinon, le bâtiment s'écroule aussi longtemps qu'on essaye de le remonter. L'histoire de la Grande Arche de la Défense est la version la plus récente de cette légende. Voici l'épopée de cette Arche superbe, enjeu de luttes politiques au couteau sous le règne de François Mitterrand. C'est aussi le portrait de son créateur, Johan Otto von Spreckelsen, architecte secret, professeur aux Beaux-Arts de Copenhague. Lauréat inattendu d'un grand concours international en 1983, ce Danois découvrit avec stupéfaction la désinvolture et les revirements à la française. Laurence Cossé évoque un destin d'architecte parmi les plus beaux, les plus tragiques et les plus absolus du XXᵉ siècle.

livré en 4 jours

livré en 4 jours

  • Date de parution 24/08/2017
  • Nombre de pages 400
  • Poids de l’article 203 gr
  • ISBN-13 9782072720192
  • Editeur FOLIO
  • Format 180 x 115 mm
  • Edition Livre de poche

l’avis des lecteurs

Le hasard a voulu que je pénètre pour la première fois dans la Grande Arche à peine quelques semaines avant la lecture du récit de Laurence Cossé. J’ai regretté que l’inverse ne se soit pas produit, j’aurai apporté bien plus d’attention au monument, et l’aurai sans aucun doute vu d’un autre œil… œil qui aurait alors été tenté de verser une larme pour Johan Otto von Spreckelsen.

Mais faisons tout d’abord les présentations. 

Johan Otto von Spreckelsen était danois (nous verrons que ce détail a son importance). Ceux qui l’ont connu à l’occasion des événements dont il est question dans ce récit s’accordent à dire qu’il illustrait à lui tout seul l’adjectif anglo-saxon fair, qui n’a pas vraiment d’équivalent en français, qui allie noblesse du cœur, charme de l’esprit et grâce physique. Sa discrétion et sa modestie ne l’empêchaient pas d’être exigeant ; c’était un homme simple mais intelligent et cultivé, qui avait le goût de la qualité. Si nous nous intéressons à celui qu’en France, on appelait Spreck, c’est qu’il était architecte et que c’est son projet qui remporte en 1983 le grand concours international et anonyme lancé après des années de débats et de tergiversations pour finaliser l’aménagement du quartier d’affaires de la Défense. Il s’agit de "rendre une unité à (cet) ensemble disparate, réorganiser une architecture dévertébrée", en ornant ce lieu ô combien stratégique que représente le bout de la perspective historique parisienne situé dans l’axe de l’Arc de Triomphe.

Lorsqu’il participe à ce concours, Spreck n’a construit que sa maison et trois petites églises. Ces dernières témoignent de sa fascination pour le carré et le cube, formes constitutives de l’œuvre qu’il dessine pour la Défense, qu’il ne cessera d’ailleurs de désigner comme "le Cube". Une oeuvre qui lui ressemble, par son élégance et sa simplicité, qui échappe aux courants stylistiques répertoriés, et fait une quasi-unanimité. Il y a là une audace qui séduit, à travailler le vide plutôt que de faire du plein, et à opter, plutôt que pour la hauteur, pour la largeur, annihilant toute velléité de compétition avec un environnement vertical. Le projet est inconditionnellement soutenu par François Mitterrand, nouveau président qui y voit le fleuron des multiples projets architecturaux qu’il lance à son début de mandat ; bien que 1983 soit "le tournant de la rigueur", l’argent coule à flots pour la culture, ce dont l’opposition fait un de ses chevaux de bataille, épargnant néanmoins l’Arche qui, comme une évidence, échappe à la critique, du moins dans un premier temps.

Assez vite, avec le passage de la conception du monument à sa construction, naît chez Spreck une angoisse et une déception qui augurent du cauchemar que va devenir pour l’architecte la construction de son "Cube".

Johan von Spreckelsen est davantage un artiste qu’un bâtisseur. C’est un virtuose du quatuor à cordes et de la musique de chambre, un méticuleux qui donne la primauté à l'esthétique. Il n'a pas d'expérience des défis techniques, et est perdu avec les contraintes matérielles qu’implique sa création. Il a l’habitude de tout maîtriser dans le moindre détail, à l’anglo-saxonne. Or, en France, l’usage veut que les architectes soient déchargés de la mise au point technique de leurs projets par la maîtrise d’œuvre et ses services d’études, fonctionnement sans doute mieux adapté à un projet de cette ampleur. Entre les dessins de l'architecte et la réalité de la construction, il y a une quantité d'intervenants, des puissances comme Bouygues, des ingénieurs, et des techniciens avec leur propre langage, des juristes, des financiers, des ouvriers…

Par ailleurs, sans doute induit en erreur par sa relation directe et facile avec François Mitterrand, Spreck n’avait pas jusque-là idée de la complexité des choses en France.

Lui qui adore ce pays a au fil de ses interactions avec les acteurs en charge du projet de plus en plus de mal à le comprendre. Les différences culturelles pèsent sur leurs échanges. En bon danois, Spreck a l’habitude du consensus et de l’efficacité. Il déteste l’affrontement, l’agitation et le manque de fiabilité. Dire qu’il est déstabilisé face à un fonctionnement en partie basé sur le conflit et le changement incessant de plans ainsi que par la complexité administrative française est un euphémisme. 

Un autre point important, non souligné jusqu’à présent, est la dimension humaniste du projet de Spreck, qu’il va être l’un des derniers à défendre. En vain. Précisons que le concours intégrait bien dans son cahier des charges la future fonction du monument, censé abriter quelque noble organisation… mais laquelle ? On évoque un vague Carrefour international des communications, dont personne ne sait vraiment ce qu’il englobe et signifie. Or, Spreck est particulièrement attaché à cette vocation humaniste qui l’a porté lors de la conception de son Cube, dans lequel il imagine un Centre de rencontres international. Sauf que, entre le lancement du concours et la construction de l’Arche, le climat économique s’est assombri. L’illusion lyrique a fait place à la rigueur, d’autant plus que le coût du monument a augmenté. 

L’incommunicabilité entre Spreck et les équipes, les heurts entre maitrise d’ouvrage et maitrise d’œuvre, certains essayant de composer entre les contingences du réel et les exigences de l’architecte (parfois, avouons-le, en effet irréalistes), les réajustements multiples éloignant de plus en plus l’ouvrage du rêve du danois, font que les travaux prennent un retard terrible. Or, à l'approche des élections législatives, François Mitterrand (sans qui le projet n'aurait jamais vu le jour) veut que les grands projets soient avancés au point où ils ne pourront plus être abandonnés. L'arche est alors à la fois le plus lourd et le moins avancé de tous : il faut absolument que le chantier s'ouvre en juillet 85. Le Président veut bien perdre les élections, mais pas la face.

Quand la droite passe, les travaux sont suffisamment entamés mais le nouveau gouvernement vote l'économie sur les grands chantiers, et c’est l’Arche seule qui en fait les frais : c’est l’unique projet dont l’Etat se désolidarise de de tout financement. C’est alors la course aux investisseurs, il faut trouver des acquéreurs pour les 80000 m2 de bureaux que contiendra finalement le monument. S’engage alors une bataille politico financière d'une violence inimaginable pour contrer les velléités d’acquisition de financiers qui dénatureraient complètement l’œuvre. En attendant, adieu Carrefour des communications, mais aussi les collines de verdure que Spreck avait imaginés autour de l’Arche ou les nuages aériens censés occuper son ouverture. Son "Cube" va finalement devenir tout ce qu’il déteste : une enveloppe peut-être superbe mais vide, saturée de bureaux, un big business.

Spreck finit par jeter l’éponge…

"La grande Arche" est ainsi l’histoire de la confrontation d’un rêve à une réalité qui le défigure, la triste épopée d’un homme dépossédé de son œuvre, qui va opposer pendant trois ans l’immatérialité de ce rêve au prosaïsme retors des affaires, des ambitions et des rancunes.

La collecte de données techniques, de matériau d’archives, de témoignages, a permis à Laurence Cossé de restituer de nombreux aspects de cette grande et triste aventure, qu’elle lie en toute homogénéité : enjeux économiques et politiques, prouesses techniques et contraintes matérielles, complexité des rapports humains. Au centre de son récit, la figure du malheureux architecte fascine autant qu’elle émeut -j’en garderai pour ma part cette image de l’Albatros, parce que "ses ailes de géant l’empêchent de marcher", évoquée lors des témoignages-. 

Respectueux des faits, son récit porte néanmoins son empreinte, par des apartés qu’elle dote parfois d’une ironie subtilement cinglante -notamment pour souligner les aberrations de certains fonctionnements étatiques qui feraient sourire s’ils n’étaient pas aussi coûteux pour le contribuable- et l’insertion d’anecdotes liées à son sujet à son enquête, à l’origine par exemple de rencontres parfois improbables dont, explique-t-elle, "la poésie veut qu’on rende compte".

Passionnant.


AUTRES LIVRES DE Laurence Cossé
Le secret de Sybil

Le secret de Sybil

Chronique blogger
Au bon roman

Au bon roman

Nuit sur la neige

Nuit sur la neige

Les amandes amères

Les amandes amères

DOLPO RECOMMANDE
La prochaine fois que tu mordras la poussière

La prochaine fois que tu mordras la poussière

La Propagandiste

La Propagandiste

Chronique blogger
Mars

Mars

À présent

À présent

Livraison soignée

Nos colis sont emballés avec soin pour des livres en excellent état

Conseil de libraires

et des sélections personnalisées pour les lecteurs du monde entier

1 millions de livres

romans, livres pour enfants, essais, BD, mangas, guides de voyages...

Paiement sécurisé

Les paiements sur notre site sont 100% sécurisés